Entre les lignes
Emmanuel Bourdier
Folio junior 2016 (Première édition Thierry Magnier 2005)
Un village français
Par Michel Driol
1943, un village en zone libre, à proximité de la ligne de démarcation, où vivent Augustin – 11 ans – et sa jeune sœur, leur mère et le grand père depuis la mort du père. Un mystérieux résistant ridiculise les Allemands, en signant sas actes de vers tirés de Cyrano de Bergerac. Est-ce l’instituteur ? ou le marchand de peaux de lapins ? Qu’est-ce que quitter l’enfance entre des colonnes des troupes allemandes qui écrasent une poupée et les billes qu’on veut acheter près de la Kommandantur ?
Sur un sujet maintes fois traité, Emmanuel Bourdier signe là un beau roman, une galerie de personnages complexes – le marchand de peaux de lapin – et attachants – la mère, le grand père – dans une France rurale et occupée. Entre les lignes, c’est entre l’enfance et l’âge adulte, entre la collaboration et la résistance, entre la réalité et le théâtre, la façon dont se construisent un destin, une personnalité, dans le souvenir et la fidélité aux valeurs et aux rencontres passées. On apprécie que rien de trop ne soit dit dans ce roman, écrit dans une langue épurée, avec une grande légèreté de ton. On apprécie qu’il soit laissé au lecteur le soin de faire le lien entre le prologue – 1973 – et le reste du roman. On apprécie aussi que tout soit vu et raconté du point de vue d’Augustin, à hauteur d’enfant, sans jugement adulte sur les actes, avec la bravoure inconsciente et la naïveté profonde de l’enfance.
Un roman d’initiation plein d’humanité, de tendresse et d’humour aussi, qui aidera à comprendre comment certaines rencontres peuvent décider d’un destin, et comment résister à l’oppression.