Pom Pom Pomme Amos

Pom Pom Pomme Amos
Anne Cortey, Janik Coat

Grasset jeunesse, 2024

Tout en rondeur

Par Anne-Marie Mercier

Pour les amateurs de la série des histoires d’Amos, cet album ajoute une jolie pierre à l’édifice délicat qui construit ce presque personnage : animal proche du lapin par ses oreilles, de la chouette par ses grands yeux, il a un corps potelé d’enfant au milieu duquel un joli nombril montre qu’il n’a ni plumes ni poils. De plus, sa tête est bleue, ses oreilles et son corps sont rouges… Amos est une incarnation d’enfance, il ressemble à un dessin d’enfant. Les formes sont justes esquissées, ou remplies aux crayons de couleur sur un papier à gros grain.
ici, nous voyons Amos dans une activité encore plus simple : il se réveille, il a faim, il prend son petit déjeuner (thé fruité et pommes), il va faire un tour. Tout cela est rythmé par une petite chanson (« pom pom »), mais aussi par la déclinaison des différentes couleurs de pommes (jaune, vert, rouge) et par l’envie de décrocher la grosse pomme jaune qui luit dans le ciel.
C’est mince mais charmant, sensible aux petits bonheurs et adapté aux tout petits. Les pages ne sont cependant pas cartonnées et l’album est de format assez grand pour suggérer une découverte avec un adulte.

 

Merci Soleil

Merci Soleil
Delphine Chedru
Sarbacane (sarbabb), 2024

De l’astre à la cerise : leçon de choses pour les petits

Par Anne-Marie Mercier

« Voici la terre. La terre tourne autour du soleil. Le soleil porte le jour… »
On aura reconnu le fameux jeu, souvent utilisé en poésie, du « marabout bout de ficelle », ou de la comptine « trois petits chats, chapeau de paille »…, ou, plus doctement, de l’anadiplose ou concaténation. Autrement dit, de fil en aiguille, de la terre au soleil, du soleil au jour, on passe aux plantes, fleurs et fruits qui aboutissent à l’objet important : la confiture sur la tartine.
C’est une belle idée pour faire saisir aux tout petits comment les bonnes choses qu’ils peuvent mettre en bouche sont issues de la nature entière. On peut ajouter aussi les mains anonymes au-dessus du chaudron où bout la confiture !
Les illustrations aux couleurs franches, associant primaires et complémentaires, les formes simples et les phrases courtes, les sourires gourmands, le format carré et cartonné, tout cela est parfait, et bien adapté aux tout petits.

 

Quelque part sous les étoiles

Quelque part sous les étoiles
Ramona Bădescu, Amélie Jackowski
la Partie, 2023

Bonjour la vie

Par Anne-Marie Mercier

Ce petit album célèbre la beauté du monde et tout simplement la vie en se plaçant à la hauteur d’un vermisseau, l’une des plus petites créatures observables par un enfant : le vermisseau nait « quelque part sous les étoiles » et découvre successivement le blanc mousseux des nuages, le bleu du ciel, le vert de l’herbe, le jaune des pissenlits , le mouvement du vent… avant de découvrir que des yeux le regardent, ceux d’autres créatures qui pourraient être ses parents.
Il essaie de faire quelques mouvements mais a du mal à commander à son corps tout neuf. Sa vue accommode de mieux en mieux: les images deviennent plus nettes, isolent des formes.
Il commence à se faire des idées sur la vie : douce (comme un nuage), dansante (comme les herbes et les arbres dans le vent), simple et compliquée à la fois, ensoleillée, lente et rapide à la fois, ensoleillée…
Les images font se succéder pages à fond blanc, à fond vert, ou bleu, ou jaune, sur lesquelles se détachent les nouvelles choses perçues ou le vermisseau lui-même, bien mignon et souriant, dans sa robe rayée qui lui donne une allure d’enfant emmailloté. C’est frais et beau, simple et compliqué, rapide et lent, doux… et beau.
Feuilleter sur le site de l’éditeur.

Ramona Bādescu est par ailleurs l’auteure de la série des Pomelo, mais aussi de Au début (Les Grandes personnes), Il faudra (La Partie), Ce que je peux porter (Albin Michel), autant dire d’albums de genres très variés qui insistent sur l’attention à la vie et invitent à la réflexion.

 

Youpi Youpla

Youpi Youpla
Aurelia Gaud
Sarbacane (sarbabb), 2024

Par Anne-Marie Mercier

Deux poupées se font face de part et d’autre de la pliure. L’une a la peau claire, l’autre noire ; l’une est en bleu, l’autre en jaune ; l’une monte et descend, l’autre se balance… petit à petit les personnages brisent la frontière invisible qui les séparait, l’un va retrouver l’autre dans sa page,  d’une page à l’autre ils se mélangent.
On découvre progressivement que les images fonctionnent avec le même nombre d’éléments graphiques dans des combinaisons différentes : les éléments verticaux de la poupée bleue deviennent un chapeau, des agrès… Les éléments ronds de la poupée jaune également : c’est un peu comme travailler avec le même paquet de gommettes pour réaliser différentes images. C’est aussi comme jouer à la poupée, échanger les vêtements, les détourner, et mélanger cela avec des cubes, c’est un jeu.
C’est aussi une belle illustration du plaisir du mélange, de l’échange et de la rencontre avec l’autre. L’album est cartonné, à destination des petits, comme l’indique la collection, mais il est de ceux qui pourraient accompagner longtemps l’enfant.
Sur le site de l’auteur on peut retrouver ces belles images acidulées

Didlidam Didlidom

Didlidam Didlidom
Sabine de Greef
L’école des loisirs (pastel), 2024

Philosophie politique, comme une comptine

Par Anne-Marie Mercier

Ça a l’air tout simple, une petite comptine de rien du tout : le texte est rythmé par « Didlidam Didlidom », mots du titre qui introduisent une scansion et rien de plus. Mais ce « rien », cette apparente simplicité porte un récit, simple lui aussi, riche de sens, comme ses images.

« Il était un petit homme, didlidom, qui avait une petite maison, un canard, un chien, un mouton. Une petite dame, didlidam, habitait juste à côté avec sa vache, sa poule et son chat Barnabé. Au milieu, un arbre aux fruits dorés. Dans le ciel, le soleil, la lune et des milliers d’étoiles. » Le bonheur, non ?

Eh bien non, comme dans trop d’histoires humaines gâchées par le ressentiment et l’envie d’obtenir plus que le voisin, toujours soupçonné d’être favorisé. Escalade (au sens propre comme au figuré), destruction de leur milieu, tentative ruineuse de reconstruire « comme avant », avant d’arriver à penser à un autre monde possible, fait de partage et non de guerre de chacun contre tous. Tout cela est raconté en quelques doubles pages, avec un dessin très simple, une situation très visuelle et des images parlantes.
C’est l’occasion de relire Ci-gît l’amer, guérir du ressentiment de Cynthia Fleury qui éclaire parfaitement notre triste actualité, ou écouter une interview de Cynthia Fleury

 

 

 

 

Le Monde est immense

Le Monde est immense
Anne Cortey, Marion Cocklico
Grasset jeunesse, 2024

Le monde en gommettes

Par Anne-Marie Mercier

Dans ce joli petit album cartonné, c’est le point de vue d’un très jeune enfant que l’on suit : le monde au-dessus de lui, avec le ciel et les étoiles, le monde devant lui, avec la montagne qu’il voit de sa fenêtre, les fourmis, les fleurs, et la prairie parcourue par le vélo de sa mère qui revient vers lui.
Papiers collés, gommettes, peinture aux couleurs franches à fond perdu fond de cette rêverie un bel espace graphique à contempler à hauteur d’enfant.

C’est l’histoire d’un éléphant

C’est l’histoire d’un éléphant
Agnès de Lestrade, Guillaume Plantevin
Sarbacane (Sarbabb), (2012) 2024

 

Par Anne-Marie Mercier

Les éditions Sarbacane, dans leur collection Sarbabb, rééditent certains de leurs titres. Celui-ci, paru en 2012 revient dans le même petit format adapté pour les tout-petits, en version carrée et cartonnée aux coins arrondis.
L’éléphant dont il s’agit ressemble furieusement, sur la couverture, au colonel Hati du Livre de la Jungle adapté par Disney : son air grognon est justifié ici par le fait qu’il a mal dormi à cause d’une chauve-souris bruyante. Il tente de passer sa mauvaise humeur sur le premier qu’il rencontre, lequel se vengera sur le suivant, etc. Chaque épisode commence par la formule « c’est l’histoire de… », soulignant l’aspect de randonnée, et la dernière nous ramène à la première : la souris raconte à la chauve-souris comment elle a fait peur à l’éléphant, la chauve-souris rit bruyamment avec elle, et il suffit de revenir à la première page pour boucler la boucle.
Le texte, qui enchaine et répète les épisodes en alignant les propositions relatives, utilise des termes qui feront rire les enfants par leurs sonorités (riquiqui, popotin, mouflet), et les images, très expressives et superbement colorées participent au piment de l’ensemble. Les yeux des animaux courroucés et le rire de la chauve-souris sont parfaits, un régal !

Le Creux de ma main

Le Creux de ma main
Laetitia Bourget, Alice Gravier
Sarbacane (Sarbabb), 2024

Expériences sensibles

Par Anne-Marie Mercier

Les éditions Sarbacane publient une collection pour les plus petit, nommée « Sarbabb ». Ses petits albums, carrés et cartonnés proposent aux tout petits des expériences sensibles à leur portée ou des histoires aux thèmes et aux rythmes adaptés.
« Dans le creux de ma main j’ai recueilli… » L’album énumère ce qu’un enfant peut saisir ou plutôt accueillir dans sa main : un flocon de neige, un oiseau blessé, un têtard, de l’eau, une luciole, un coquillage, de la farine…, toutes choses légères et délicates, jusqu’au bébé nouveau-né de la dernière page. Chaque chose apporte une connaissance : le temps qui passe, la croissance des plantes et des animaux, le savoir-faire de la pâtissière, le début d’une collection…
À chaque page de gauche, montrant sur fond blanc la fillette en action, correspond, à droite, l’animal enfui, le flocon fondu, la collection…, dans une image à fond perdu remplie de couleurs et de formes, jusqu’à la dernière double page qui présente une seule image, réunissant la fillette et le bébé. L’enfant qui tient ce livre est lui-même invité à se saisir de ces formes et de ces expériences.

Dans mon monde

Dans mon monde
Lois Ehlert
Les Grandes Personnes, 2023

Micro méga cosmos

Par Anne-Marie Mercier

Tout un monde, en effet, dans un album et surtout dans les mots qui en déclinent les aspects saillants, à hauteur de tout petit : insectes, vers de terre, fleurs, feuilles, papillons, cailloux, grenouilles, soleil et étoiles… chacun a droit à une propriété (rayonnant, virevoltant, qui s’épanouissent, qui se tortillent…) et surtout à une page ou deux pages successives, portant une même découpe et ouvrant chacune sur de nouvelles perspectives. Les grenouilles sont, à la tourne de page, « bondissantes », les insectes sont ceux « qui rampent », imprimant un mouvement sur le mouvement de page ; ailleurs, les papillons de nuit changent de couleur, rouges et noir d’un côté, bleu nuit de l’autre. Parfois cette tourne de page fait changer d’espace tout en restant la même : la page bleue piquetée de trous est d’un côté la pluie, de l’autre les étoiles. Enfin, chaque superposition de découpes fait entrevoir d’autres combinaisons de couleurs et de formes. C’est presque infini, comme le monde.
My World a été publié aux Etats-Unis en 2002. L’auteure a reçu le prix Caldecott Honor Book pour « Color Zoo » en 1990 (publié en français au Genévrier en 2011 dans sa collection de classiques « Caldecott Album« ).

Crabe

Crabe
Géraldine Collet, Olivia Cosneau
Sarbacane, 2023

Mystère orangé

Par Anne-Marie Mercier

Cet album documentaire cartonné, de format carré arrondi aux angles est un livre à rabats adressé aux plus petits. Les concepteurs ont pris grand soin à arrondir également les découpes et systèmes afin de ne pas blesser les petites mains qui le manipuleront et assurer davantage de longévité à l’objet.
On apprend l’essentiel, et tout cela en vers de mirliton : combien de pattes, sa démarche, son habitat, ses prédateurs… Tout cela avec un système de questions dont les réponses en général se trouvent sous les rabats. Attention, pour que cela fonctionne il faut prendre soin à replier par avance certains qui se présentent parfois ouverts quand le livre est neuf, brisant le suspense et la logique de lecture qui par ailleurs sont parfaits.
Belles couleurs (quoique… cet orangé superbe de Crabe irait mieux à du cuit que du cru, mais c’est si joli…), formes épurées, ensemble lisible et dynamique, une belle occasion de renouer avec la plage.
Pour ramener les plus grands à la plage avec un crabe, on pourra lire Mademoiselle Princesse coquette veut être grande.