Mon père est une saucisse

 Mon père est une saucisse
Agnès de Lestrade
Rouergue, Dacodac, 2013

 

Deviens ce que tu es…

 Par Caroline Scandale

 

Le père de Séraphine s’ennuie profondément dans sa vie d’expert comptable. Décidé à changer de voie professionnelle, il annonce à sa famille interloquée qu’il veut devenir comédien. S’en suivent de vives réactions et de l’incompréhension mais au final tout le monde soutient ce papa et mari hors norme et fantasque… Il débute tout de même sa carrière d’acteur en incarnant une saucisse Knacki!

Ce petit roman sur l’accomplissement de soi délivre une belle image de la famille et de la relation père-fille. De surcroît, Il montre en filigrane la difficulté à sortir du système surtout par temps de crise… L’antithèse du titre reflète parfaitement l’image que la société ou la famille se fait d’un homme non carriériste qui préfère s’accoutrer en chipolata pour une publicité plutôt que de brasser les chiffres dans son cabinet de comptable.

 Un roman nietzschéen dès 7 ans!

 

 

 

Tout le monde veut voir la mer

Tout le monde veut voir la mer
Agnès de Lestrade
Le Rouergue, 2011

La mer ? Et puis quoi encore ?

Par Simon Dumoulin master MEFSC Saint-Etienne

toutlemondeveutA travers le regard de Marika, petite franco-algérienne, l’auteur nous conte une histoire sans cesse conduite par l’optimisme. On se retrouve ainsi plongé dans les rêves de Marika, auxquels s’oppose la précarité des banlieues. Banlieues où la pauvreté est réelle, où l’on enferme les habitants dans des stéréotypes, mais où les gens savent vivre avec simplicité. A la cité des Muguets, la précarité est très rapidement dépassée par l’optimisme des habitants, mais aussi par les rêves de Marika, grâce auxquels elle espère offrir à sa mère l’occasion de revoir l’Algérie, son pays d’enfance.

Puis vient l’excursion à la mer avec tous les autres enfants de la cité… Rien ne semble plus ennuyeux et banal qu’un voyage à la mer. En tout cas Marika ne veut pas y aller. Elle, ce dont elle rêve, c’est faire du cheval. Pourtant, voici que la mer va devenir une explosion de liberté pour ces enfants, et Marika va découvrir que le monde dans lequel elle vit au quotidien n’est pas celui qu’elle croyait.

Ce livre, bien qu’il soit destiné à des enfants de 10 ans, touche à des phénomènes de société auxquels tout le monde est confronté : racisme et intolérance sont clairement évoqués dans cette histoire, à travers le monde de la banlieue. A celui-ci s’oppose celui de la mer qui semble être au contraire un monde, où la tolérance et l’acceptation de l’autre évoquent un avenir optimiste. « Ainsi, dans la vie, j’ai appris qu’il ne fallait désespérer de personne ».

Le Chapeau de Philibert

Le Chapeau de Philibert
Agnès de Lestrade, illustrations de David Merveille
Rouergue, 2011

La tête verte… ?

Par Malvina Lair et Laura Limousin master MESFC Saint-Etienne

Comme souvent, Agnès de Lestrade a imaginé, dans cet album, I’histoire d’une personnalité atypique. En effet, le héros est un petit homme habillé tout de vert, qui se prénomme Philibert. Un beau matin, il décide de jardiner, au grand étonnement des passants. Et pour cause… Philibert vit en plein centre-ville ! Notre héros est-il fou, rêveur ou simplement  utopiste? A vous de le découvrir!

Tout au long de I‘histoire, nous partageons la bonne humeur de ce personnage farfelu, qui va s’approprier toute sa rue en y créant son jardin personnel. Ceci est loin de plaire à son voisinage mais fait le bonheur des enfants et donc du lecteur ! Grâce aux illustrations riches en détails et très colorées, celui-ci découvre petit à petit  les dégâts causés par Philibert.

David Merveille, avec ses personnages tracés à grands traits, multiplie les références et les clins d’œil qui ne cesseront de nous faire sourire, en nous donnant envie de partir à la recherche du détail passé inaperçu !

Le texte et les images sont indissociables pour saisir toute la portée humoristique du livre et le décalage qui en découle amusera tout aussi bien les enfants que les adultes. C’est ainsi que le lecteur assistera à la scène délirante dans laquelle notre jardinier arrose la robe à fleurs d’une  passante.  Grâce à son fameux chapeau, Philibert va faire une rencontre, à travers laquelle il va transmettre sa vision du monde et ainsi faire découvrir la rnétamorphose du paysage urbain en fresque printanière.

Cet album avec sa couverture « vert-pomme », ses jeux sur les mots et son ton léger, fait vivre au jeune lecteur un moment poétique et humoristique.

Un indien dans mon jardin

Un indien dans mon jardin
Agnès de Lestrade
Rouergue (dacodac) , 2010 

Crise de père

Par Anne-Marie Mercier

Un indien dans mon jardin.jpgIl arrive que les parents se mettent à débloquer. Parfois, un problème qui n’a pas été réglé dans leur jeunesse les empêche de se conduire de façon rationnelle. C’est ce qui arrive au père de Mia qui plante une tente dans son jardin et fait l’indien, attendant un signe, tandis que sa femme, compréhensive, patiente; sa fille, elle, s’inquiète de plus en plus.

La solution viendra, et le lecteur a le choix entre penser qu’elle est issue de la raison ou née de la folie même, justifiant ce détour nécessaire. L’histoire est loufoque, mais le ton de Mia est bien posé et on pourrait transposer ce rêve d’indien en bien d’autres comportements plus fréquents mais non moins dérangeants pour l’entourage.

 

Le Jour où j’ai abandonné mes parents

Le Jour où j’ai abandonné mes parents
Agnès de Lestrade
Rouergue (DACODAC), 2011

Tout le monde n’a pas eu la chance d’avoir des parents communistes… et catholiques !

 par Sophie Genin

9782812602221.gifLa collection « Dacodac », petite soeur de « Doado » au Rouergue, se voit dotée d’un nouveau roman réaliste dans lequel Karla-Madeleine (en hommage à Karl Marx, du côté de son père, et en référence à la religion catholique de sa mère) part pour la première fois en vacances avec ses parents, très très différents l’un de l’autre, pour ne pas dire à l’opposé. Il faudra à la jeune fille rencontrer, par hasard et pour la première fois, sa tante et sa cousine ainsi que fuguer, l’espace de quelques minutes, pour connaître enfin les raisons de la rencontre complètement improbable de ses géniteurs : son père, « du chocolat fondu sur un chamallow », à l’intérieur, et sa mère, qui sait « qu’on ne se ballade pas en sandalettes sur un volcan en éruption » (le volcan en question étant son mari tentant vainement de ranger une tente « pop-up » !).
Le ton adopté par Agnès de Lestrade est juste et l’histoire fait mouche : la narratrice est touchante et pourrait faire penser à Josiane Balasko enfant dans Tout le monde n’a pas eu la chance d’avoir des parents communistes, sachant que c’est encore plus délicat dans cette famille puisqu’il faut concilier les deux fois incompatibles de ses parents !
Des perles qui permettent de s’initier à l’art délicat de la politique à partir de 9 ans ponctuent le texte :
« Je savais bien que beaucoup de gens sur cette Terre portent des sacs de chagrin bien plus lourds que les miens. Quand on grandit avec un communiste et une catholique pratiquante, si on ne sait pas au moins ça, on est la championne des tartes. Mais j’avais treize ans et les chagrins de la Terre, je les avais tétés avec le sein de ma mère. J’avais droit à l’insouciance. Oui, l’insouciance. J’allais créer un syndicat de l’insouciance. » (p. 26)