Le grand trou américain
Michel Galvin
Rouergue, 2012
Vertige et admiration
Par Maryse Vuillermet
Quel enfant n’a pas rêvé des Américains, leurs fusées, leurs grandes voitures, leurs grandes maisons, leurs grands westerns, leur grand tout… ?
Cet album est fondé sur cette admiration et ce rêve américain mais en même temps qu’il l’exalte, il le détruit. En effet, les Américains « qui inventent toujours des choses extraordinaires », (comme l’auteur) ont inventé un grand trou et ils l’ont placé sur une immense place. Mais ce trou est dangereux. Il ne faut pas s’en approcher. Une femme qui poursuit son chien y tombe avec lui et elle est multipliée avec lui. Qu’à cela ne tienne, on invente une machine pour la/les ressortir et on lui/leur construit une maison, chacune avec une voiture américaine, et une niche…
Y tombent ensuite successivement des boulettes de viande, du coca et même un bandit. Là c’est plus embêtant s’il se trouve multiplié, on y a donc envoyé des agents secrets, multipliés eux aussi…
Le dessin est en noir et blanc avec des traces de couleurs, comme les vieux films colorisés, ou la télévision à ses débuts, souvenirs ou rêves ? Nous sommes donc plongés dans un univers loufoque de la toute puissance et de la démultiplication. Le rêve américain avec tous ses mythes, agents secrets, bandits, maisons, machines, usines, progrès… est convoqué mais aussi le cauchemar américain de la démesure, de l’uniformité, de la course en avant, de l’abondance infinie et envahissante.
Imaginaire délirant mais critique angoissante, magnifique travail de représentation d’un rêve qui, poussé jusqu’au bout de sa logique, vire au cauchemar.