Petit fiston

Petit fiston
Elzbieta
Le Rouergue, 2013

Clown triste cherche amis

Par Anne-Marie Mercier

petitfistonIl y a beaucoup de vent et beaucoup de larmes dans cet album. Petit fiston est l’enfant du conte : il n’a plus de mère, elle a été remplacée par une autre qui lui veut du mal. Il est aussi l’enfant sur la route : pourchassé, pris entre terreurs réelles et imaginaires, il trouve un ami, perdu comme lui, un petit chien. Puis tous deux rencontrent un homme qui dort dans la rue ; c’est peut-être un ange.

Tout l’art d’Elzbieta est dans le « peut-être », dans la magie plaquée sur la dureté du réel. Comme dans Petit gris (où le héros et sa famille « attrapent » la pauvreté), l’espoir renaît au milieu de la noirceur afin de laisser entendre qu’il y a toujours une solution à tous les malheurs. Le costume de clown du héros, l’humour et la simplicité des décors confèrent à cette fable une dimension universelle et distanciée.
Les images accompagnent cette impression de précarité et de faiblesse et sont proches de l’esthétique de L’Ecuyère (qui finissait là où l’histoire de petit fiston commence : dans un cirque). Les personnages sont dessinés sur des petites bandes de papier chiffon coloré. En arrière plan, un paysage minimal et symbolique : nuit, arbres, ciel, plage… Parfois la page s’ouvre et prend le large : les bandes forment ensemble un paysage unique qui occupe toute la page, comme celle qui montre des oiseaux volant vers l’autre bout de la terre, au-delà de la mer, loin, mais « tout droit ».
Plonger dans le malheur et faire apercevoir une sortie, loin mais « tout droit », voila l’enfance de l’art d’Elzbieta.

 

 

 

Angel Fire

Angel Fire
L.A. Weatherly
Traduit (anglais) par Julie Lafon
Gallimard jeunesse, 2012

Guerre aux Anges !

Par Anne-Marie Mercier

angelfireSuite de Angel, ce volume a des allures de road movie, avec des héros en fuite, partant des USA vers le Mexique, allant de motel en camping pour fuir les terribles anges-vampires qui sont en train de conquérir la planète. La catastrophe se fait cataclysme quand la lutte de l’ange déchu contre ses supérieurs conjuguée à celle des héros contre les anges provoque une série de tremblements de terre et la ruine des grandes cités du monde.

Comme le précédent, ce roman est un piège efficace pour les lecteurs amateurs de suspens et de paranormal. Il vise surtout les jeunes lectrices qui se délecteront peut-être des atermoiement sentimentaux de Willow entre deux garçons et deux amours. On aura reconnu sans doute une situation proche de celle de l’héroïne de Twilight, tandis que le tourment de celle qui se sait être la fille du monstre évoque La Guerre des étoiles. De bonnes recettes, pas trop mal mixées et un décor (Mexico) assez bien utilisé.

La suite se passera au Nevada avec le même trio, d’où le titre: « Angel fever »…

Fille des chimères (la marque des anges, 1)

Fille des chimères (la marque des anges, 1)
Laini Taylor
traduit (anglais-USA) par Anne Krief
Gallimard jeunesse (grand format), 2012

Ange ou démon ?

Par Anne-Marie Mercier

filledeschimeresCe roman est une belle surprise à l’heure où tant de récits proposant des anges et des démons encombrent la production pour adolescents et jeunes adultes. Le cadre tout d’abord se permet des fantaisies : Prague où se déroule l’essentiel de l’intrigue, une Prague à la fois pittoresque et réaliste (l’héroïne y est étudiante en art, fréquente des cafés gothiques, arpente les rues et les places), Marrakech ou d’autres endroits plus lointains comme le nord canadien sont des étapes évidemment contrastées et mystérieuses. La fin du roman invente un autre univers, un monde parallèle nocturne et inquiétant, où anges et démons se livrent une guerre sanglante.

L’intrigue est elle aussi très bien construite et l’on découvre très progressivement les personnages et les enjeux : Karou, dont le nom signifie « espoir », a une vie secrète dans la maison de créatures étranges, des « chimères », mi-animales mi-humaines, qui l’ont élevée ; elle est quant à elle d’apparence totalement humaine, en dehors de ses cheveux bleus, et ignore ses origines. Elle ne les découvre qu’à la fin d’un long parcours où elle résout le mystère des activités de Sulfure, son tuteur aux cornes de bélier, marchand de vœux. Sa curiosité provoque la catastrophe qui  le perd, la plonge dans la solitude et la culpabilité et menace de tout détruire.

Le roman recycle de grands mythes, mythes bibliques comme le combat des anges et des démons (ici, les chimères), ou les portes marquées par un signe qui donne vie ou mort, le mythe faustien de la connaissance et du pouvoir sur la vie et la mort. Il s’achève avec l’histoire de l’origine de l’héroïne dans une belle histoire fantastique d’amour et de mort, de trahisons et de résurrections pour s’ouvrir sur une suite qui se déroulera dans l’autre monde.

Le roman a été sélectionné dans la liste des meilleurs livres pour la jeunesse à sa parution par le New York Times, Publishers Weekly et Kirkus Reviews.

Angel

Angel
L.A. Weatherly
Traduit (anglais) par Julie Lafon
Galllimard jeunesse, 2011

Romance paranormale, très normale

par Anne-Marie Mercier

Les anges sont à la mode et sont en passe peut-être de remplacer les vampires. Comme eux, ils ont une apparence humaine, sont très méchants ; ils se « nourrissent » des humains qu’ils laissent exsangues ou fous, avant de les tuer. Les deux héros ont pour mission de sauver la planète menacée par une invasion de ces êtres venus d’une autre dimension. Cela va leur prendre quelques volumes (le deuxième tome est annoncé pour aout 2012).
Willow est en apparence une jeune fille normale, mais sa mère est folle, elle ne sait qui est son père et a des pouvoirs de divination dans un premier temps avant de se découvrir mi ange mi humaine ; ses camarades savent si bien qu’elle est bizarre qu’ils la fuient. Alex, orphelin, a été élevé dans un camp d’entraînement de la CIA (on retrouve aussi la mode des espions façon Cherub…). Entre eux, on le devine, va naître un amour fou (mais rassurez vous comme dans Twilight, rien de sexuel pour l’instant). L’intrigue qui leur fait sillonner l’Amérique est menée avec quelques longueurs mais la lutte entre anges et tueurs d’anges a de l’allure et captivera ceux qui cherchent un gros « page turner » pour l’été.
L.A. Weatherly est par ailleurs l’auteure de la série « l’école des fées » (folio cadet) sous le nom de Titiana Woods.