Tomber 8 fois, se relever 9
Frédéric Marais
HongFei, 2024
Rescapé de la guerre, héros de la boxe
Par Anne-Marie Mercier
Cet album vient, après les nombreuses commémorations de la première guerre mondiale, célébrer la figure oubliée d’une gueule cassée qui a, comme le titre l’indique, su se relever. La phrase de Jigoro Kano, placée sur la dernière page donne le sens de ce titre : «on ne juge pas un homme sur le nombre de fois qu’il tombe mais sur le nombre de fois qu’il se relève».
Eugène Criqui a été grièvement blessé en 1915. Evacué, soigné, opéré, il a parcouru toutes les étapes de souffrances jusqu’à pouvoir revenir dans sa vie d’avant, celle d’un boxeur. Dans cette vie aussi il tombe et se relève bien souvent, jusqu’à sa victoire , à New York en 1923, où il devient champion du monde.
L’histoire est racontée en peu de mots. Et par contagion on imagine cet Eugène en homme taiseux. Les images elles aussi ne donnent pas dans le pathos mais nous font vivre les événement au plus près : explosion éblouissante lors de la blessure, écarquillement des yeux au réveil, cadrages étonnants, toutes magnifient cet homme, sa solitude, son courage.
Le choix des couleurs allant du noir profond (superbe) à l’orangé en passant par un bleu intense ajoutent à la sobriété de l’ensemble, une sobriété pleine d’effet. Le regard de Criqui, ou sa silhouette solitaire sur le pont de Brooklyn sont de ceux qu’on n’oublie pas.
On retrouve ici le beau style graphique de Frédéric Marais que l’on avait vu à l’œuvre dans Le Pousseur de bois, chez le même éditeur, et le même désir de montrer des êtres démunis réussir par la force de leur volonté.