Mathieu Hidalf et la Foudre Fantôme

Mathieu Hidalf et la Foudre Fantôme
Christophe Mauri

Gallimard Jeunesse, 2011

Petit manuel du parfait aventurier égoïste ?

 

Par Matthieu Freyheit

Mathieu Hidalf 2Dans une chronique précédente, l’auteure s’interrogeait sobrement : « Cet enfant est-il totalement stupide ? » On aurait envie de répondre tout aussi sobrement : oui. Jusqu’à un certain point, seulement. Au mot désopilant employé par les critiques pour évoquer les aventures du jeune Mathieu Hidalf, on voudrait substituer celui d’horripilant. D’un égoïsme forcené, le héros gâche parfois de sa présence un livre bien écrit et au rythme soutenu. Toutefois, ce deuxième épisode des aventures de Mathieu implique une évolution du personnage qui quitte peu à peu (on espère définitivement) l’âge exclusivement égoïste pour développer une personnalité plus complexe. On aimerait en effet que l’égocentrisme du jeune garçon soit rendu plus jouissif et décomplexant pour le lecteur par le retour qu’autorise le second degré. Mais l’égoïsme enfantin est peut-être celui-ci qui, précisément, n’intègre pas encore cette complexité.

Ainsi Mathieu Hidalf grandit-il dans ce volume. C’est bien toute son importance d’ailleurs, psychologique et narrative. Parvenu à l’âge de onze ans, Mathieu peut enfin se présenter aux épreuves d’entrée de l’école de l’Élite. Son ambition n’est pourtant pas glorieuse en intégrant cette école : acquérir une liberté telle qu’il pourra assouvir pleinement les volontés de sa formidable personne. La suite des événements va partiellement transformer cette ambition. Si l’on est tenté de rayer les répliques souvent agaçantes du héros, on est aussi agréablement surpris de voir l’auteur amener des changements discrets et subtils dans le caractère de son personnage. D’autant plus que le lecteur a la chance de pouvoir s’attacher à des personnages secondaires bien construits : Juliette d’Or, sœur de Mathieu ; Juliette D’Airain, sœur de Mathieu ; Rigor Hidalf, père de Mathieu ; ainsi que ses compagnons directs d’aventure. Au contact de ces différentes figures, l’égoïsme du héros connaît ses premières limites, et c’est tant mieux. Car en sous-main, le livre reprend le motif agaçant et éculé de l’originalité, armé du cliché selon lequel c’est en débordant des cadres et des conventions que l’enfant construit sa personnalité… Rien de nouveau sous le soleil. À moins – on l’espère – que ce deuxième volume ne soit pour l’auteur l’occasion de défendre l’idée que le cadre sert précisément à complexifier une personnalité qui, sans limites et sans conventions, demeure monolithique, donc inintéressante. On peut douter cependant que cette interprétation fasse sens auprès des jeunes lecteurs, tant elle ne parvient pas à s’imposer dans le roman devant l’égoïsme de Mathieu. C’est, peut-être, l’une des intelligences de Christophe Mauri : nous donner l’envie de plonger dans le volume suivant pour confirmer ou infirmer cette évolution. Tout en ramenant l’enfant à ce qu’il est et doit être : un enfant, dont il ne faut pas attendre des comportements d’adulte. Pas encore.

Mathieu Hidalf et le sortilège de ronces

Mathieu Hidalf et le sortilège de ronces
Christophe Mauri
Gallimard Jeunesse, 2012

Belle confirmation

Par Matthieu Freyheit

MatthieuhidalfroncesDans le deuxième volume de la série, Christophe Mauri engageait une première modification du personnage qui cessait d’être ce monstre d’égoïsme du premier opus pour s’ouvrir à l’acceptation des autres. Dans ce troisième volet, l’auteur confirme cette évolution du héros qui, tout en conservant (aux yeux des autres surtout) son caractère « légendaire » (on préfère « insupportable »), devient aux yeux du lecteur un adolescent complexe, parfois même intéressant. N’en déplaise par ailleurs aux titres très J.-K.-rowlingiens de la série, le personnage de Mathieu Hidalf n’a pas grand-chose de l’ennuyeux Harry Potter, et tient parfois davantage de l’insupportable (lui aussi, d’où la liaison) Naruto, du manga de Masashi Kishimoto, avec qui il partage le même objectif : devenir le plus célèbre des combattants d’élite. Cependant, le bon cœur de Naruto est remplacé ici par le malin génie de Mathieu Hidalf. Pourtant, pourtant ! le plaisir du lecteur naît cette fois, précisément, du bon vieux principe de l’arroseur arrosé : Mathieu Hidalf battu à son propre jeu, pris à ses propres pièges, le tout dans une intrigue rondement menée et, il faut bien l’avouer, passionnante. Christophe Mauri n’écrit pas sans humour, et les revers de son personnage ne peuvent que nous ravir.

Voila, en peu de mots, de quoi il s’agit. Les lecteurs du premier volume se souviennent que Mathieu Hidalf est parvenu à faire épouser au roi, contre son propre désir, une vieille sorcière. Le Gand Busier (c’est comme ça qu’on l’appelle) voit enfin venir l’heure de se venger : il profite, avec Hidalf père, d’une conférence de presse donnée par Mathieu pour le piéger et annoncer son mariage avec son ennemie jurée : Marie-Marie du Château Boisé. S’ensuit une fuite non pas en Egypte mais dans l’enceinte de l’école des Élitiens, dans laquelle Mathieu a été accepté au cours du deuxième opus. Dès lors tout s’enchaîne et l’on retrouve avec bonheur des personnages secondaires riches et finement travaillés par un auteur qui a l’intelligence de ne pas tout miser sur son héros.

La série de Christophe Mauri, en somme, évolue significativement, tant dans l’avancée de ses aventures que dans la construction de ses personnages. Aucun n’est oublié, et quelques détails préparent d’ores et déjà le terrain d’une suite que l’auteur, dans son talent, sait nous faire attendre. Bien joué !

 

Le Premier Défi de Mathieu Hidalf

Le Premier Défi de Mathieu Hidalf
Christophe Mauri
Gallimard jeunesse, 2011

Sale gosse

Par Anne-Marie Mercier

Un peu  de magie, un peu d’intrigues de palais, un peu de suspens, pourquoi pas, bravo. Mais le personnage du héros est franchement agaçant et semble une offrande démesurée au narcissisme enfantin. Mathieu Hidalf déteste son père (soit) et fait tout pour le mettre en difficulté, même auprès du roi (cet enfant est-il totalement stupide ?). Mentir, tricher, trahir, tout cela n’est rien quand il faut satisfaire son caprice et son but suprême : réaliser une autre grosse bêtise qui attirera l’attention de tous sur lui. Voilà qui flatte l’infantilisme au point de faire oublier d’autres enjeux présents dans le livre (intégrer une école de chevaliers d’élite, lutter contre des monstres…) et quelques pages en forme de cauchemar assez réussies.