Les morceaux d’amour

Les morceaux d’amour
Géraldine Alibeux
Autrement, 2012

Que ne ferait-on pas par amour ?

Par Christine Moulin

les-morceaux-d-amour-de-alibeu-geraldine-914729357_MLNous sommes dans l’univers du conte : les personnages ne sont pas individualisés (« la jeune fille », « le jeune homme »); la guerre dont revient le soldat vaut pour toutes les guerres; Géraldine Alibeu a réduit à l’essentiel le décor, rural et enneigé, dans les tons ocre qui sont sa signature.

La jeune fille tombe amoureuse du jeune homme, bien que celui-ci ait perdu un bras, un œil et une jambe mais le jeune homme ne la remarque même pas, perdu qu’il est dans sa tristesse. Comme elle l’aime et qu’ « il n’y a pas d’amour sans preuve », elle lui envoie son bras, ses cheveux et son œil. Le jeune homme retrouve goût à la vie et tombe amoureux de sa bienfaitrice. La fin, très morale, affirme la force de l’amour, au-delà des apparences et du désespoir (« On ne voit bien qu’avec le cœur », ce qui explique sans doute les allusions au Petit Prince sur la première de couverture : l’écharpe et le renard). Tout est parfait, un peu trop, peut-être. L’ennui n’est pas loin.

Un aperçu de l’album sur le site de l’auteur.
Une analyse éclairante sur le site du journal suisse Le Temps.

Veux-tu devenir bête ?

Veux-tu devenir bête ?
Pei Chun Shih, Géraldine Alibeu
Hongfei Cultures, 2012

Leçons de bêtes à l’usage des hommes

par Anne-Marie Mercier

Qu’est ce que posséder ? dans quelles conditions peut-on élever un enfant ? que désirer ? et surtout qui croire et que croire, voilà toutes sortes de questions qui sont évoquées dans ces rencontres-dialogues entre la Bête et un poisson, un homme, ses amis le lapin et la grenouille. Récits en apparence absurdes, mais plein de sagesse, entre Lewis Carrol et Arnold Lobel. Les dessins de Géraldine Alibeu sont parfaitement adaptés à ce style.

La Bête a reçu le prix 2007 de l’association de littérature de jeunesse de Taiwan (voir la chronique de Dominique Perrin sur son précédent ouvrage (NB : je ne l’avais pas relue, je vois qu’elle aussi a pensé à Lobel, pour Ranelot et Bufolet).

 

La bête et les petits poissons qui se ressemblent beaucoup – « Vague-à-bonder » en connivence avec les jeunes lecteurs de Taïwan

Pei-Chun Shih, Géraldine Alibeu
La bête et les petits poissons qui se ressemblent beaucoup

HongFei, 2011

« Vague-à-bonder » en connivence avec les jeunes lecteurs de Taïwan

Par Dominique Perrin

 A déguster : trois histoires rieuses, fondantes et nourrissantes de « la Bête », à qui le lecteur s’identifie rapidement et volontiers malgré son étrange physique de têtard-félin à corps de poupon (ou « écureuil-chat-limace » selon un groupe de jeunes lecteurs évoqué par l’illustratrice) : mentalement, elle est parfaitement humaine, ou humainement parfaite, curieuse et disponible – mais sa patience a des bornes – poète et attentive – et cela sans modération. Ce sont là comme trois épisodes d’une histoire bien plus ample, où l’on apprend, petit ou grand, à « vague-à-bonder » en toute confiance au pays des vivants mais aussi au pays des mots.

« La Bête », cousine lointaine plus étrange des Ranelot et Buffolet d’Arnold Lobel, est à Taïwan, son pays d’origine, l’héroïne d’autres histoires, et son propre parcours éditorial en constitue une à part entière. Elle a été créée en 2003-2004, publiée et primée par l’association de littérature de jeunesse de Taïwan en 2007, traduite pour la première fois et illustrée à nouveaux frais en France en 2011 (dans l’illustration taïwanaise, elle était encore autre, « toute mignonne, avec la queue d’un renard, le visage d’un ours et les pieds d’un cochon »)… (entretiens de Pei-Chun Shih et de Géraldine Alibeu en ligne sur http://blog-de-hongfei-cultures.hautetfort.com).