Je voudr@is que tu…
Frank Andriat
Grasset, 2011
Le Tour du Net par une enfant
Par Christine Moulin
Certes, il faut mettre les jeunes en garde contre les dangers de la Toile: c’est ce que fait ce livre rapide à lire où l’on voit une adolescente, Salomé, se laisser séduire virtuellement par un certain Michaël. Coralie, une de ses amies sur le « chat d’or », dépasse les limites et en subit les tragiques conséquences. Mais refaire, à propos des nouvelles technologies, les erreurs d’antan, est forcément contreproductif. Prendre le prétexte d’une fiction pour délivrer une leçon de morale, caricaturale, qui plus est, ce n’était déjà pas très folichon du temps de Madame Bruno. C’est assez vain, voire irritant, aujourd’hui. D’autant plus irritant que l’on peut soupçonner le texte d’une certaine démagogie. Est-il nécessaire, pour plaire aux lecteurs, d’écrire : « Cette prof est un véritable doigt d’honneur au bonheur? », de propager le poncif de la prof de français qui dégoûte de la littérature et qui empêche d’écrire (1)? Pourtant, ce roman aurait pu être une incitation à l’écriture, grâce à la vocation de son héroïne, qui veut devenir écrivain, et grâce à ses diverses formes de narration, le journal intime de Salomé, les conversations « in real life » entre ados, quelques textos et le chat – écrit « correctement », précise Salomé: oui, mais justement, ce chat paraît très artificiel et ne se distingue guère du journal. L’écriture est uniformément ordinaire (transcrire telle quelle la langue des jeunes, ou du moins, celle qu’on leur attribue, ce n’est pas en rendre compte). Une occasion manquée.
(1) Frank Andriat est pourtant prof de français lui-même et il a écrit plusieurs livres sur son métier, dont Les profs au feu, l’école au milieu.