La folle Evasion

La folle Evasion
Sandrine Bonini – Merwan Chabane
Seuil jeunesse 2024

Escape game grandeur nature

Par Michel Driol

Tessa va avoir 11 ans. Elle est une fillette au caractère bien trempé, fine, intelligente, coquette, et couvée par ses parents. Dans sa classe il y a Matéo, cheveux trop longs, débraillé, qui a toujours oublié ses affaires, un vocabulaire limité et une passion pour le skate. Ce matin-là, Tessa ramasse la carte tombée de la poche de sa mère, une carte avec l’adresse de « la folle évasion ». Ce n’est pas très loin de chez Matéo, et les deux enfants, un peu en cachette, s’y rendent, et acceptent de participer à l’escape game proposé par le gérant.  Mais lorsqu’ils en sortent, les voilà menacés par des bandits, aidés par une policière, prisonniers dans un supermarché où on se livre à de drôles de trafics… Bref, courses poursuites et aventures hors du commun !

La folle Evasion se présente d’abord comme un thriller pour enfants à la première personne. Les aventures s’y enchainent, toujours plus angoissantes, toujours plus folles, toujours plus dangereuses pour les deux héros, entrainés à un rythme d’enfer par les circonstances dont ils ne sont que le jouet. Mais surtout c’est drôle, d’abord  à cause du contraste entre les deux personnages, la première de la classe toujours tirée à quatre épingles, le cancre accro au skate. Ce contraste, Tessa, la narratrice, n’hésite pas à la souligner, soulignant les stéréotypes langagiers de Matéo, commentant ses actions sans aménité.  Mais c’est aussi drôle en raison des personnages secondaires que l’on rencontre, l’animatrice du rayon sushi qu’on croirait sortie d’un manga par sa tenue, le pépé grincheux et ses chats…. Enfin, c’est drôle par les commentaires que fait Tessa sur les situations, les personnages, commentaires imprimés en italique et qui établissent une sorte de métadiscours plein d’humour.  On laissera bien sûr le lecteur savourer jusqu’à la fin cette folle évasion urbaine, et en découvrir la chute aussi surprenante que réjouissante ! C’est un roman premières lectures longues (il fait près de 160 pages), dans une typographie agréable et aérée, et superbement illustré. Des personnages pleins de vie, souvent saisis en action, facilement reconnaissables à leurs tenues, aux longues jambes de Tessa, aux cheveux trop longs de Matéo, avec un graphisme très coloré, qui font penser à ce que le film d’animation peut avoir de meilleur.

Deux enfants que tout oppose obligés de collaborer pour se tirer d’un mauvais pas, pour la plus grande joie des lecteurs, dans une aventure pleine de sel et de piquant que Roald Dahl ne renierait sans doute pas !

Choco train

Choco train
Adrien Albert
L’école des loisirs, 2024

Combat de mamies

Par Anne-Marie Mercier

Deux mamies voyagent séparément pour assister au gouter d’anniversaire déguisé de leur petite fille. L’enfant raconte leur voyage en fonction de ce que sa mamie George lui a raconté dit : celle-ci a pris le train pour venir et a enfilé son déguisement de clown à bord du train en suivant ses instructions, puis elle s’est rendue à la voiture bar pour lui acheter ses biscuits préférés, des Choco train, que l’on ne trouve qu’à bord des trains. Jusqu’ici tout va bien.
Mais mamie Georges, découvrant un babouin en train de voler tous les gâteaux, attaque celui-ci : poursuites, dans le train, sur le toit du wagon (comme dans un western), sur les pentes d’une montagne, en hélicoptère… jusqu’à la chute des deux mamies enfin démasquées (le babouin était mémé Lucie), en plein milieu de la fête et sous une pluie de choco train.
Les dessins sont très drôles, rendant le voyage de mamie Georges absolument épique (on suit son point de vue). Le ton de la narration, naïve, est celui d’un enfant qui ne sait ce qu’il doit croire mais sait bien qu’il est infiniment aimé. Chouchou était le personnage de Chantier Chouchou debout,  album dans lequel sa mamie Georges l’entrainait dans un grand nettoyage
Jolies images très expressives, couleurs franches, rythme endiablé, tout est drôle et charmant.

 

 

Conspiration 365

Conspiration 365 (vol. 1 : janvier, vol. 2 : février…)
Gabrielle Lord

Traduit (anglais) par Ariane Bataille
Rageot poche, 2013

Le tour d’une série en 365 jours

Par Anne-Marie Mercier

conspiration365_1 L’auteure, australienne habituée aux ateliers d’écriture, est partie d’une bonne idée. Comme l’auteur de la série Harry Potter avait organisé ses volumes en années scolaires, elle a découpé la sienne en mois, de janvier à décembre et étirer ainsi l’intrigue. De ce fait, de janvier à février on n’apprend pas grand chose sur cette « conspiration » ; la narration est avare quant à la distribution des pièces du puzzle, indices qui permettent d’avancer dans la compréhension, mais se construit autour des multiples péripéties qui suivent la fuite de cal Ormond, qui doit se cacher pendant un an en tentant de comprendre pourquoi son père est mort et quelle énigme il doit résoudre pour mettre fin à la persécution que subit sa famille.

conspiration365_2Peu de descriptions, peu de personnages, pas de psychologie, des faits. Les décors, tous urbains, sont limités : la maison, le collège, les différentes caches de Cal… et des lieux qui induisent la péripétie (égouts : subir une inondation ; zoo : se trouver dans la cage aux fauves) ; on se croirait dans un jeu vidéo. Ecrite comme un journal de bord, en peu de pages aérées et en gros caractères, en unités qui excèdent rarement la double page, la série est un bel exemple d’écriture facile et de suspens feuilletonesque.