Un rêve sans faim
François David, Olivier Thiébaut
Motus, 2012
De la poésie, du rêve et de la jeunesse
– dans leur rapport au politique
Par Dominique Perrin
Dans cet album au grand format souple, ce sont d’abord les images d’Olivier Thiébaut qui s’imposent au lecteur ; elles mobilisent des matériaux aussi variés que fondamentaux, à l’état brut ou manufacturé, agençant différentes dimensions d’une anthropologie de la faim au vingt-et-unième siècle. Elles sont, on cherche le mot, confondantes. Elles ne suscitent ni larmes ni même serrements de cœur, mais mettent en branle la pensée, « sans coup férir » et durablement.
Le texte de François David se présente comme la succession souple d’autant de poèmes-arguments d’une page, à la fois autonomes et solidaires, alternant les points de vue et les angles d’attaque, sur ce gros morceau livré conjointement à la sensibilité et à l’intellect : sur cette planète une et indivisible (« il y a un seul monde », rappelle à bon entendeur tel philosophe contemporain) cohabitent la plus aberrante richesse thésaurisatrice* et… une quantité irreprésentable de personnes, notamment d’enfants, mal nourris ou mourant de faim.
Texte et image s’offrent ici en vis-à-vis (et comme « visage à visage », conformément à l’étymologie) dans une vingtaine de doubles-pages présentées par l’éditeur comme dédiées à un sujet « peu abordé » frontalement en littérature de jeunesse – et moins encore en poésie.
*(nous soulignons plus explicitement encore que ne le fait ce très grand album)