La grande dame et le petit garçon

La grande dame et le petit garçon
Geert DE Kockere, illustrations de Kaatje Vermeire
Rouergue, 2010

 

par Chantal Magne-Ville

La grande dame et le petit garçon.gifLe format imposant de cet album contribue à renforcer l’impression de mystère qui domine dans cette histoire du lent apprivoisement d’un petit garçon par une vieille femme imposante, qu’il redoute au début sans pouvoir pour autant échapper à sa fascination.

La structuration des images reflète la vision initiale de l’enfant, qui craint qu’elle ne soit une ogresse, au point que la femme n’entre pas toujours entièrement dans le cadre, alors que l’enfant est réduit à une silhouette. Les visages demeurent flous tant que la reconnaissance mutuelle n’est pas intervenue. L’ombrelle de la vieille femme et la cage de son oiseau deviennent des pièges à enfants, et tendent au début à occuper tout l’espace. Les tons bruns et sépia sont austères et ne s’éclairent que progressivement par les couleurs qui ornent le vêtement de l’enfant. L’instant de la rencontre est symbolisé par une contre-plongée sous les jambes des gens normaux, où les visages se colorent et ont enfin des traits précis. Métaphore de la découverte, l’énorme sac à provisions qui intriguait tant l’enfant porte un trou de serrure dans lequel il finit par s’introduire.

Le texte bien que traduit du néerlandais, en une mosaïque de petites phrases, relève de la prose poétique et son dépouillement sert bien la montée de cette amitié singulière. L’échange symbolique des cartes de chats contre des dessins se résout devant la porte, dernière barrière avant la rencontre véritable. Celle-ci est remarquablement représentée : on sent que Kaatje Vermeire, dont c’est le premier album en tant qu’illustratrice, a travaillé la gravure car elle parvient à faire ressortir le moindre relief du bois de manière quasiment tactile.