L’attrape-rêves
Xavier-Laurent Petit
L’école des loisirs (Médium), 2009
Wilderness, amour et dynamite
Par Anne-Marie Mercier
Plusieurs thèmes s’entrecroisent dans ce beau roman, aussi rêveur que plein de suspens et d’action. La solitude et le malheur du jeune Chems sont exemplaires de beaucoup d’autres : étranger arrivant au collège d’une vallée fermée sur elle-même, il est rejeté du seul fait de son étrangeté et de sa pauvreté (il vit dans une caravane avec sa mère). La jolie Louise, du même âge, vit seule avec son père, brave type assez obtus et silencieux. Elle brave tout le village pour aider, puis aimer Chems. Entre ces deux-là, c’est une belle histoire d’amour. Il y a entre eux peu de mots mais beaucoup de nature, la forêt américaine du Wild, ses oiseaux nocturnes, loups, ours, ses neiges et blizzards. Face à eux, les hommes du village sont des brutes stupides, qu’ils soient jeunes ou vieux.
Autour des adolescents, le monde bouge : la scierie qui faisait vivre la vallée ferme, et chacun se trouve désemparé. Un projet de barrage, et chacun se trouve enrôlé. Seuls Chems, puis Louise et Dolores, après son départ, tentent de s’y opposer par amour pour cette vallée et les animaux qui y vivent, par refus du monde qu’on leur propose : un complexe touristique au bord du lac qui doit engloutir le village et la vallée et des maisons confortables.
Suspens, poursuite, embuscades et attentats donnent à la deuxième moitié de l’ouvrage un rythme différent. A la poésie méditative des débuts succède un roman du terrorisme écologique. Mais le dernier mot du roman est laissé au retour vers la poésie à travers la belle figure du professeur d’anglais de Louise qui lui fait découvrir Emily Dickinson et le vin :
« Balayer mon cœur avec soin et mettre l’amour de côté
Nous ne nous en servirons plus avant l’éternité. »
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