Les Victorieuses ou le palais de Blanche

Les Victorieuses ou le palais de Blanche
Laetitia Colombani, Clémence Pollet
Grasset jeunesse, 2021

Un palais pour les femmes sans toit

 

Par Anne-Marie Mercier

Reprenant le dispositif de destins croisés utilisé par Laetitia Colombani dans son roman au titre semblable (en Livre de poche), cet album pour la jeunesse remplace le personnage de la jeune femme d’aujourd’hui (peu apprécié d’ailleurs par la critique du « Masque et la plume » au moment de la parution du roman) qui faisait le pendant de Blanche par une héroïne enfant : Sumeya a cinq ans ; elle est partie d’Afrique avec sa maman pour venir à Paris, où elle a trouvé refuge dans le « palais de la femme », un hôtel situé à Charonne, racheté par Blanche Peyron et son mari pour l’Armée du salut.
Salma, la réceptionniste, lui raconte l’histoire de Blanche, une histoire d’émancipation, de voyage, d’amour (la rencontre avec son mari, salutiste, est joyeuse, autour d’une découverte de la bicyclette et de multiples chutes). Document sur l’action d’une femme du XIXe siècle qui ne s’est pas laissée enfermée dans le rôle que l’on voulait lui assigner, évocation du travail d’une association caritative particulière, au service des plus démunis, constat de ses réussites et du travail qui reste à faire, c’est un album gai, très coloré, dans lequel on insiste davantage sur les réussites dans le domaine de l’accueil des réfugiées que sur les carences. Il n’ y a pas de misérabilisme, mais pas non plus d’aveuglement, pas de religion, ni d’austérité rébarbative, beaucoup d’élan et de jeunesse : les femmes sont des « victorieuses », ou sont en passe de le devenir.