Moi, les mammouths

Moi, les mammouths
Manuela Draeger
L’Ecole des loisirs, 2015

Sherlock Holmes chez Boris Vian

Par Matthieu Freyheit

Manuela Drmoilesmammouthsaeger n’en est pas à son coup d’essai, pas plus qu’elle n’est le premier coup d’essai de celui dont elle est l’hétéronyme : Antoine Volodine. Depuis Au Nord des gloutons, Manuela Draeger invite ses lecteurs à suivre les ‘aventures’ de Bobby Potemkine, enquêteur devant l’Eternel – mais on ne sait pas bien lequel. Les chauves-soubises sont toujours là, ainsi que Lili Nebraska l’ensorceleuse, et toute la bizarrerie d’un monde éminemment pluriel qui trouve son contrepoint dans la simplicité du style, évacuant tout superflu : les choses sont là, voilà tout.

Dans ce nouvel opus, Bobby, entouré notamment d’une directrice de Maison du peuple réduite dans un bloc de glace et de deux mouettes moqueuses, enquête sur la présence d’un mystérieux groupe de mammouths. Mais l’enquête est d’abord un prétexte, et l’action est celle des images et des rêveries qui défilent («Je ne suis pas rouge, c’est le reflet du vent sur mes joues »), des jeux de langage : bref, un prétexte à l’écriture. Moi, les mammouths, comme l’ensemble des enquêtes de Bobby Potemkine, est un outil parfait pour introduire aux plaisirs de la création, à l’idée que l’assemblage des mots suffit parfois pour que quelque chose se produise (le mot est un geste pas comme les autres), ainsi qu’au contact de l’étrange, de l’échappée. Il y a du Boris Vian dans ce texte, mais exempt de superficialité : une poésie lunaire qui ferait songer aux Fleurs de neige de Max Ernst.

On salue, au passage, la très belle couverture proposée à partir d’une photographie de Lise Sarfati ; et on se replonge, aussitôt, dans les précédents volumes des aventures de Bobby Potemkine.

 

 

 

 

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