La Passe-miroir, t. 2 : Les disparus du Clairdelune
Christelle Dabos
Gallimard (« grand format »), 2015
De l’autre côté des miroirs : merveilleux !
Par Anne-Marie Mercier
On avait été saisi par l’originalité et la puissance d’invention du premier tome, qui mêlait la poésie froide de La Reine des neiges d’Andersen (pas l’autre !), l’inventivité de Harry Potter et une part de la fusion entre réalité du siècle dernier (ou du précédent) et imaginaire de La Croisée des mondes, et on l’est tout autant par le deuxième. Le monde du Pôle où la jeune et gauche Ophélie a été emmenée sur décision officielle par un homme qu’elle doit épouser et qu’elle n’aime pas gagne en complexité et devient de plus en plus inquiétant.
Ophélie s’approche de l’ancêtre immortel qui règne sur ce monde, devient sa conteuse avant d’être sa lectrice pour déchiffrer un livre mystérieux et illisible. Elle comprend ainsi les raisons de ce mariage diplomatique dans lequel elle n’est qu’un pion. On voit apparaître une autre figure inquiétante, celle de « Dieu », figure qui domine les ancêtres que l’on croyait jusqu’ici tout-puissants. La Cour, que l’on avait déjà pu observer comme un panier de crabes dangereux devient de plus en plus traître et mortifère, tandis que les illusions magiques qu’elle produit sont autant de pièges.
Mais le roman n’est pas uniformément sombre : on a de belles figures d’alliés atypiques, on découvre de nouveaux clans aux pouvoirs insoupçonnés, l’écharpe animée d’Ophélie se déchaine, la famille pittoresque d’Ophélie débarque et sème une joyeuse pagaye… Enfin, les relations entre Ophélie et son fiancé, le grand comptable revêche du royaume, Thorn, sont pleines de rebondissements, de profondeur et de hauts et de bas. Le suspens est conduit de bout en bout, quant à la fin, elle surprendra même ceux qui pensent pouvoir tout deviner, tout en étant d’une logique imparable…
On attend la suite avec impatience et on espère que la « pression » des fans ne pèsera pas trop lourd sur la belle imagination et la rigueur de la jeune auteure : qu’elle prenne son temps !