Lettres à mon cher Grand-père qui n’est plus de ce monde

Lettres à mon cher Grand-père qui n’est plus de ce monde
Frédéric Kessler, Alain Pilon
Grasset jeunesse, 2017

Beau duo pour un beau doublé

Par Anne-Marie Mercier

Frédéric Kessler et Alain Pilon tiennent avec leur deux volumes les deux bouts de la chaine de la vie: après ses lettres adressées à son petit frère in utero, Thomas écrit à son grand-père mort et enterré. On retrouve le ton agacé et impérieux du petit épistolier : ses reproches quant à la date de la mort (trois jours avant Noël = conseil, choisissez le jour de la rentrée par exemple, où tout le monde est triste…), ses réflexions sur le fait que le grand-père ne réponde pas, n’a pas arrosé les fleurs sur sa tombe…

Des vérités  finissent par sortir  (l’ennui, les difficultés du grand-père, bien diminué), le chagrin connaît ses crues et ses décrues, en suivant la progression de la compréhension  de ce qu’est la mort : une absence totale et définitive. Restent les photos, les souvenirs, la découverte du grenier et d’autres photos, où l’on voit que  le grand-père a été lui aussi un petit garçon, un bébé… Thomas  ne va pas jusqu’à déduire que, en bonne logique, lui aussi, petit garçon, mourra un jour ; mais on s’en approche. C’est dire la retenue de cet album qui avance prudemment et pas-à-pas sur une question que d’autres affrontent frontalement. C’est bien : il faut de tout en littérature de jeunesse, pour tous les âges et toutes les sensibilités (Frédéric Kessler a publié un petit roman intitulé A Mort la mort chez Thierry Magnier).

On retrouve l’humour léger du premier opus, mais il est tempéré par l’absence des réponses du grand-père, ce qui nous prive de l’échange savoureux que l’on avait dans l’album précédent : on comprend que les auteurs, qui ont mis en scène un échange de lettres débutant avec un embryon tout juste formé, on été rattrapés par le souci du réalisme  et n’ont pas souhaité donner une équivalence de vie à un à peine conçu et à un tout juste mort. Oui, le bébé est une personne – et le mort non. Cet album porte ainsi, malgré l’humour de la situation, une gravité qui fait ressentir la solitude de l’enfant. Comme dans le premier album, les adultes sont totalement absents, mais – belle trouvaille ! – le grand-père apparait dans une dernière vignette, lisant Babar à son petit-fils.

Bel hommage du dessinateur Alain Pilon dont, au fait, le style et la palette de couleurs sont proches de celles de ce grand ancêtre – son grand-père spirituel ? Une définition fine de son style sur Its nice that :  » between the quaint, minimal children’s book illustration of yore and a far more contemporary slant on comic book arts, with half-tone dots and monochromatic palettes a’plenty. The result is aesthetically pleasing and easy to digest, without losing out on any of the inherent humour ».

Bravo au duo d’artistes!

 

Une réflexion sur « Lettres à mon cher Grand-père qui n’est plus de ce monde »

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