Le Cadeau des Affreux

Le Cadeau des Affreux
Meritxell Marti – Xavier Salomó
Seuil Jeunesse 2022

Petits cadeaux entre monstres

Par Michel Driol

On se souvient du précédent ouvrage des deux auteurs, le Festin des Affreux. En voici comme une suite, avec plus ou moins les mêmes personnages, le chef Louis Pacuit , le Loup, la Sorcière, la Momie… et bien sûr le pire de tous, l’Enfant. Cette fois-ci, nous sommes au plus profond de la forêt, en un temps où nos Affreux préférés vont ouvrir leurs cadeaux, bien cachés par des rabats, et choisis en fonction de leur personnalité et surtout des histoires dans lesquelles on les retrouve. Jusqu’à un dernier cadeau, mystérieusement adressé à tous, un livre dont la lecture va les captiver, les terrifier, les amuser… Le lecteur avisé l’aura deviné, et la fin du livre le confirmera, l’auteur de ce cadeau n’est autre que l’Enfant, déguisé en gnome, dévoreur d’histoires à faire peur, flanqué cette fois-ci d’une compagne aux lunettes truquées que l’on cherchera – et trouvera – sur les pages précédentes.

Reprenant le dispositif narratif qui avait fait le succès du Festin des Affreux, à savoir une double page par personnage, et un rabat à soulever pour découvrir les cadeaux, les deux auteurs nous livrent encore un album bien réjouissant. D’abord parce qu’il constitue une suite au Festin : revient, de façon récurrente, la peur que les Affreux ont de cet Enfant qui les avait traumatisés dans la livraison précédente. Ensuite parce que les cadeaux s’inscrivent à la fois dans l’intertextualité (et on retrouvera le miroir de la Reine dans Blanche Neige, ou encore Hansel et Gretel – il n’est pas question ici de tous les citer) et dans la modernité. Ces cadeaux sont une sorte de complainte du progrès joyeuse, dans laquelle les perfectionnements les plus audacieux ont été apportés à ces objets traditionnels, décrits dans une langue et un style qui font penser à tous les catalogues et à la publicité. Enfin par sa « morale », qui met en évidence le rôle incomparable du livre capable de faire naitre des émotions diverses et variées. Les Affreux ont d’abord la réaction attendue et sont déçus du livre (lire, c’est nul, à quoi ça sert) avant d’être envoutés par sa lecture. C’est peut-être ce renversement final qui est le plus réjouissant, manifestant le pouvoir de l’enfant sur les monstres, sa façon de jouer avec eux, de ne pas hésiter à se jeter dans la gueule du loup avec la complicité, cette fois-ci encore, de Maitre Pacuit, un enfant plein de vie et d’espièglerie auquel le lecteur aura plaisir à s’identifier !

Un album qui s’inscrit parfaitement dans l’univers de Meritxell Marti et Xavier Salomó : intertextualité malicieuse, jeu amusant avec les peurs et les monstres, univers décalé dans lequel les enfants ont le beau rôle !

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