Comme deux confettis
Didier Jean et ZAD, Sandrine Kao
2 Vives Voix, 2013
Difficultés du conte de fées considéré comme document
Par Dominique Perrin
L’impulsion de cet album, telle que l’explicite la présentation de l’éditeur, est singulière et ambitieuse : évoquer par la voix d’un enfant la « naissance » des parents en tant que couple procréateur. Cela remonte à leur première rencontre – d’où le titre un peu décalé de l’ouvrage, qui en pointe le caractère parfois philosophiquement improbable. Ensuite est évoqué le désir d’enfant, et d’être parent, et le baptême que constitue le fait de recevoir le nom de « papa » et de « maman ». Ce trajet est évoqué ici non sans humour et sans finesse, mais sur le mode très particularisant d’un récit à tendance mi-comique et mi-romantique, où la rencontre amoureuse passe par un long blocage d’ascenseur. C’est à ce niveau que le bât blesse : l’enfant narratrice ne relativise jamais le récit plutôt idyllique qu’elle relaie, et l’ouvrage semble au contraire en promouvoir l’exemplarité.
Etrange rupture de ton donc, lorsque de la poésie à la fois efficace et convenue du récit enfantin on passe à une page documentaire terminale sur la diversité des configurations familiales aujourd’hui – loin, notamment, d’une adéquation mécanique entre parentalité et procréation, et du statut souverain de l’enfant uniment désiré par un homme et une femme qui n’ont encore jamais été parents.
Que penseront les jeunes lecteurs du décalage entre la complexité de leur réel – riche par définition, mais parfois douloureux – et ce qui apparaît finalement comme une sorte de conte de fée ?