La Ruelle d’hiver

La Ruelle d’hiver
Céline Comtois – Illustrations de Geneviève Després
D’eux 2022

Et ces hivers enneigés / À construire des igloos / Et rentrer les pieds g’lés / Juste à temps pour Passe-Partout

Par Michel Driol

C’est l’hiver. Elodie attend sagement la permission d’aller jouer dehors, dans la neige. Elle escalade une montagne de neige, est rejointe par une amie, puis d’autres, et ensemble ils renforcent les murs de leur fort de neige, le décorent de fanions… Et au moment où le soleil va se coucher commence la grande bataille contre leurs adversaires, une multitude de bonhommes de neige, coincés « entre les murs des hangars et les maisons tricotées serrées »…

Un seul regret en lisant cet album, c’est de ne pas avoir à l’oreille l’accent du Québec… On retrouve Élodie, celle de l’album précédent, La Ruelle, dans un hiver montréalais propice à faire naitre la chaleur des amitiés dans les jeux et les rires des enfants. Dans la neige blanche se détachent les frimousses roses ou bronzées des enfants du quartier, prompts à se lancer des boules de neige sans aucune agressivité. Ce n’est qu’un jeu. Au-delà de cette histoire d’amitié, on voit des enfants envahir sans peur un espace public, celui de la rue, une rue où l’on se sent en sécurité puisqu’on connait tous les voisins. C’est cet espace de liberté qui parait sans prix dans cet album, comme une ode à une certaine façon de vive son enfance, entre soi, à partager le même imaginaire et les mêmes plaisirs… On songe à ces « copains de perrons aujourd’hui dispersés aux quatre vents » de la chanson Frédéric, de Claude Léveillé… Pour le lecteur français, c’est un réel dépaysement de trouver des enfants jouant librement, en plein hiver, dans un espace urbanisé, jouant comme Don Quichotte à se battre contre une armée immense – non pas de géants – mais de bonhommes de neige… Quoi de plus pacifique ? C’est Elodie la narratrice, qui, dans une langue simple, se montre sensible à l’opposition entre le calme du paysage endormi par l’hiver et l’agitation des enfants et qui chronique cet après-midi d’hiver, à la fois si ordinaire et si extraordinaire. L’album est magnifiquement illustré par Geneviève Després, dans un format à l’italienne qui élargit l’espace, et qui demande parfois de retourner le livre pour deux illustrations verticales qui  ouvrent l’espace vers le ciel ou le resserrent entre les deux côtés de la ruelle. On prend plaisir à voir, au milieu des boules de neige qui volent, les bouilles des enfants, et cette joyeuse complicité si bien mise en image.

Un album plein de petits détails qui laissent entrevoir la magie de l’hiver dans les villes du Québec… Rafraichissant et chaleureux en ces temps de dérèglement climatique !

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