Le Surnom

Le Surnom
Gilles Baum – Mercé Gali
Amaterra 2024

Le nom des gens

Par Michel Driol

Dans la petite bande de Blaise, chacun a son surnom, Cacahouète, Biscotto ou Patatras… sauf lui. Bien sûr, dans la famille, on l’appelle Chaton, Fiston ou Crotte-de-nez. Mais cela ne compte pas, et ne reflète pas sa vraie personnalité. Alors il se met en quête du surnom parfait : Bubble-boy, Banzaï, Le Mexicain… Si les cordonniers sont toujours les plus mal chaussés, tel est le cas de Blaise, fort habile à trouver le surnom pour ses camarades, mais incapable d’imposer le sien…

Avec un humour sans faute, Gilles Baum, parfaitement illustré par Mercè Galli, nous entraine dans l’imaginaire et les pensées d’un petit garçon en quête d’identité. Si le prénom est un héritage du choix des parents, le surnom est révélateur des qualités, défauts, habitudes qui permettent de se distinguer dans le groupe. Qu’il soit valorisant – Cacahouète brille par son intelligence – ou pas –  Patatras se fait remarquer par sa malchance –  il dit, de façon certes stéréotypée, une facette de l’identité de celui qui le porte. Et, en plus, le choix du surnom, fait avec humour, n’est dans cet album jamais malveillant ou dépréciatif. On est dans un univers de bienveillance et d’amitié proche de celui, déjà ancien, du petit Nicolas. Un univers qui célèbre l’imaginaire enfantin, sa façon de voir l’essentiel, de s’en saisir, de pouvoir jouer avec lui tout en respectant l’identité de l’autre. Qui suis-je et comment est-ce que je veux être perçu par les autres ? Telle est la question à laquelle est confronté Blaise.

L’album fonctionne avec des doubles pages centrées sur un personnage, ou sur un surnom potentiel. Elles confrontent portrait des enfants et situations, toujours représentées avec humour, et dans un crayonné toujours très expressif, touchant avec finesse à la caricature tout en montrant l’intime du personnage, rendant ainsi très touchant ce pauvre Blaise en quête de son surnom, de son blason. Dans les illustrations, chaque détail compte (on apprécie la référence à Hamlet, être ou ne pas être, les arrière-plans sur lesquels il se dégage  comme celui des punitions envisagées…).

Un album enlevé, à la structure répétitive parfaitement maitrisée, qui fait le portrait d’un garçon ordinaire, archétype de l’enfance, de son imaginaire, le saisit dans ses relations familiales ou sociales. Comme un hommage à l’imagination et au regard des enfants, à ses rêves et aux blessures secrètes dont on ne perçoit pas toujours l’importance.

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