Si j’étais un oiseau
Barroux
Little Urban 2025
Pour faire le portrait d’un enfant
Par Michel Driol
Le texte de chaque double page commence par l’anaphore Si j’étais un oiseau… Puis, au conditionnel, s’affirment les propositions. Il y est question de bonne humeur, de voyage, d’émerveillements, de fruits à manger, de temps passé à observer les libellules, ou les grenouilles, de vie en lien avec la nature, porté par les vents. Puis les références se font autres : survoler les murs, les frontières et les barbelés, être moins méfiant envers les autres, accueillir du monde chez soi, ne pas se laisser enfermer. Vient alors la chute. Mais je suis un enfant… le nez au vent et la tête dans les nuages !
Nombreux sont les textes, les poèmes, qui associent l’enfant à l’oiseau. On songe à Prévert, bien sûr, à Hugo aussi, et, dans un autre genre, à la chanson de Marie Myriam. C’est dans cette tradition là que s’inscrit de recueil de Barroux, construit autour d’une solide anaphore qui invite à se projeter dans un autre monde. Monde de découvertes, de plaisirs, dans lequel on peut s’affranchir des contraintes. On retrouve bien là l’oiseau symbole de liberté, liberté d’aller et venir, oiseau qui se refuse à toute cage qui l’emprisonnerait. Mais cette liberté s’associe avec une curiosité, curiosité envers les autres, par-delà la barrière des espèces, curiosité envers les plaisirs de toute sorte. C’est un recueil à la fois plein d’hédonisme et de sens du partage, écrit dans une langue d’une grande simplicité, très concrète dans ses notations, précise dans son lexique, dans sa façon d’évoquer les vents, la rosée ou les ronces piquantes… La chute, attendue, clôt cette série d’anaphores avec malice, montrant à quel point l’enfant et l’oiseau partagent en commun , sur un plan métaphorique cette fois, deux qualités fondamentales, le nez au vent et la tête dans les nuages. Si j’étais un oiseau fait, en fait, le portrait d’un enfant libre, curieux, ouvert, rêveur, attentif.
On apprécie le grand format de cet album, qui permet aux illustrations de Barroux de se déployer dans des doubles pages pleines d’imagination et de poésie. Voyez, par exemple, comment le chant de l’oiseau semble repris par toute une chorale de chats citadins. La nature, représentée à toutes les saisons, de jour comme de nuit, affiche sa luxuriance, ses tendres couleur pastel, dans des cadrages toujours surprenants et inattendus. Si l’on suit de page en page un oiseau rose, toujours tourné vers la droite, vers le futur, les oiseaux y sont multicolores, comme les fleurs.
Un recueil de poésie qui parle de liberté, de fraternité, d’ouverture aux autres et d’espoir dans l’avenir et dans les enfants. Du grand Barroux !