Toute seule loin de Samarcande

Toute seule loin de Samarcande
Béa Deru-Renard
L’école des loisirs (medium poche), 2011

Résiste…Prouve que tu existes…

Par Chantal Magne-Ville

 Ce roman retrace l’arrivée, dans une ville d’Europe non précisée, d’une fillette qui a dû fuir l’Ouzbékistan, où sa famille originaire d’Arménie avait trouvé refuge, après l’assassinat de son père et la séparation inexpliquée d’avec sa mère. Lorsque l’Ouzbékistan a repris son autonomie après la disparition de l’URSS, le peuple ouzbek a chassé ou exterminé ceux qui venaient d’un autre pays et parlaient russe.
Prostrée après avoir été expulsée d’une voiture par une passeuse sans scrupules, la fillette revient peu à peu à la conscience à travers de nombreux flash-backs dominés par la figure tutélaire de son grand-père, qui réunissait la famille autour des histoires du passé pour conserver leur culture arménienne. Régina, qui parle russe comme son père, a intégré une bande d’adolescents car elle aime le frère de sa meilleure amie, même si cela la conduit à commettre des vols et à un enchaînement de circonstances dramatiques.
Si l’un des intérêts de l’histoire tient à la situation historique et à la peinture des tensions entre communautés, elle vaut surtout par sa vérité psychologique, entre les non-dits avec la mère, et le sentiment de culpabilité lors de la perte du père, les renoncements et l’espoir.
Inspiré par de véritables récits d’enfants recueillis par la Croix-Rouge, comme en témoignent les remerciements, le livre illustre le pouvoir des mots qui aident ceux qui ont tout perdu à reprendre pied dans l’existence et à retrouver leur humanité. Un livre fort, qui ne peut laisser indifférent, réservé à des lecteurs de 9 à 10 ans, déjà avertis.