L’étranger

L’étranger
Chris Van Allsburg, trad. Christiane Duchesne
Editions D’eux, 2022

Et tous ses animaux

Par Christine Moulin

Un nouveau Van Allsburg! Tel qu’en lui-même le temps le change, car il est question de temps dans ce nouvel album. Celui qui passe et celui qu’il fait, bizarre, détraqué, sans que pour autant ses  incartades soient génératrices d’angoisse. Ce qui est d’autant plus remarquable qu’elles sont visiblement provoquées par un étranger qui arrive un jour chez un fermier américain, Monsieur Bailey. Cet étranger, très étrange, mutique et souriant, s’adapte à la vie de famille des Bailey sans que soit jamais révélée son origine: quelques indices bizarres laissent à penser qu’il n’est sans doute pas un habitant de notre monde. Quoi qu’il en soit, tout se passe dans l’harmonie. Mais nous ne sommes pas au pays des bisounours: l’étranger ne peut rester, et malgré la tristesse provoquée par son départ, il laisse aux humains que nous sommes un message rassurant, à rebours des cris nauséabonds qui emplissent notre monde. Un message qui parle de beauté, notamment celle des arbres, de fidélité, un message qui engage à accueillir ce que l’on ne comprend pas, qui promet que l’absence n’est pas l’oubli. Tout cela est amplifié par les magnifiques illustrations: autant de tableaux (au crayon de couleur) qui célèbrent la splendeur de la nature, surtout à l’automne, mais qui, comme toujours chez Allsburg, tout en étant minutieusement réalistes, interpellent le lecteur par des détails insolites et contribuent à l’atmosphère sereinement fantastique de l’ensemble. Un nouveau Van Allsburg, oui, et nous ne sommes pas déçus!