ABC du mot image

ABC du mot image
Jean Alessandrini
Les grandes personnes, mars 2024

Abécédaire original aux fonctions multiples

Par Edith Pompidou-Séjournée

Ce livre ressemble à un cahier géant à la couverture souple mais protégée par un protège-cahier transparent. La première de couverture est majoritairement blanche sur laquelle ressort le dessin au trait de crayon noir d’un robot qui joue aux cubes. Pas n’importe quels cubes, il s’agit des quatre premières lettres de l’alphabet que le robot empile consciencieusement dans l’ordre, d’ailleurs il se gratte la tête et il a l’air en pleine réflexion. Une seule autre couleur est présente : de l’orange fluo qui tranche avec le reste. Cette dernière permet de détacher le titre mais aussi le corps du robot et si le lecteur regarde avec un peu plus d’attention, celui-ci est composé des lettres de son nom. Le R forme la tête, les deux O les épaules, le B le ventre et le T les jambes.
Une petite note orange fluo en diagonale attire l’œil comme pour nous guider dans la lecture à venir : « Des mots à trouver et à colorier ». En suivant l’ordre alphabétique, Jean Alessandrini illustre donc chaque lettre par un mot qu’elle commence. Le premier est ARCHITECTURE, imposant il occupe la double page et s’incurve même au centre pour pouvoir y tenir. Il présage parfaitement la suite du livre : les traits de crayons sont nets et précis, symbolisant détails et perspectives plus à la manière d’un dessin d’architecte que d’illustrations enfantines. Mais c’est cette clarté d’exécution qui permettra de déterminer assez facilement les lettres de chaque mot conjointement ou non à sa symbolisation selon la culture de chacun. Au-dessous du mot-image toujours en noir et blanc apparaîtra systématiquement en orange la première lettre et un nombre de petits tirets équivalent au nombre de lettres du mot, permettant de le réécrire sans en oublier.
Certaines lettres, sans doute selon leur fréquence dans le début des mots de la langue française, commenceront plusieurs mots-images tel le A, qui représentera encore un appareil photo et une auto. L’auteur joue du support pour les illustrer tour à tour sur l’intégralité de la double page comme pour accentuer la dangerosité du crocodile ou du dragon qui semblent pouvoir jaillir du livre à tout instant. Il utilise le format à la française et la verticalité de la simple page pour donner de la hauteur à la chaise ou au fauteuil mais aussi rendre l’éléphant ou l’immeuble plus imposants.
Dans les dernières pages, après la lettre Z, une collection de mots dans le désordre alphabétique reste à découvrir, et dans cette finale, l’auteur n’hésite pas non plus à empiler la locomotive, la voiture et le rhinocéros en les regroupant de façon incongrue comme tous trois rangés côte à côte dans un parking… Album ? Abécédaire ? Livre de coloriage ? Livre d’apprentissage de la lecture et de l’écriture ? Sans doute un peu tout à la fois… Grand livre-jeu c’est sûr pour le bonheur de tous les âges !

On trouvera à la date du 14 juillet une autre notice sur cet album, par Michel Driol.

 

Cahier pour apprendre à colorier autrement

Cahier pour apprendre à colorier autrement
Pascale Estellon

Les grandes personnes, 2013

Colorier est un art

Par Anne-Marie Mercier

Cahier pour apprendre à colorier autrementColorier est un art… et une technique. Ce n’est pas si simple : comment faire pour éviter de « déborder » ? comment foncer les couleurs sans surcharger en encre de feutre et risquer de percer le papier ? Toutes sortes de conseils judicieux sont donnés en première page.

Puis, vient l’art : les supports sont « autres » : dessins en broderies, proches de motifs aborigènes, dessins naïfs, pop art… et on les colorie de différentes façons : avec des traits, des chiffres, des points, des étoiles… alors, le coloriage devient autre chose et s’émancipe. C’est à cela qu’invite aussi le format exceptionnellement grand de cet album qui affiche une ambition d’album d’artiste.

Bobo lapin – …Faut-il qu’une « histoire à colorier » soit plate ?

Bobo lapin
Ramadier et Bourgeau
L’école des loisirs, 2011

…Faut-il qu’une « histoire à colorier » soit plate ?

Par Dominique Perrin

 

bob.gifBobo lapin est sans doute d’abord une « histoire à colorier » : feuilleter celle-ci comme une invitation à faire œuvre de coloriste à partir de son dessin en noir et blanc, précis et efficace en même temps que naïf, conduit à en faire une évaluation plutôt enthousiaste. Cependant, une histoire à colorier est-elle nécessairement au-delà, ou en deçà des exigences qu’on peut avoir habituellement vis-à-vis d’un album pour la jeunesse ? Nullement, serait-on tenté de répondre.
Or l’histoire est ici bien plate, et décevante : Bobo lapin se réveille malade, rejette méthodiquement les traitements fort convenus que lui proposent ses amis en fonction de leurs propres habitudes alimentaires, et finit par trouver secours chez maman lapin. Il propose finalement avec succès son remède de lapin – un jus de carotte, faut-il le préciser – à tous ses amis malades à leur tour. On est bien loin de l’absorbant Docteur loup d’Olga Lecaye, où le questionnement sur le même et l’autre, le commun et le différent, leurs jeux de miroir et de trompe-l’œil, était exploré de façon merveilleusement prenante. On est également loin d’ouvrages au texte, au dessin et à la colorisation beaucoup plus simples, et néanmoins rafraîchissants pour les esprits de tous âges.