Le cœur des louves

Le cœur des louves
Stéphane Servant

Rouergue doado, 2013

 

Le mythe du loup-garou  féminisé et revisité

Par  Maryse Vuillermet

 

 

le ceour des louves imagesUne variante originale du mythe du loup-garou. Célia revient dans le village de sa  mère et de sa grand-mère,  village perdu au fond d’une vallée sauvage  et entouré de montagnes. Sa mère  Catherine, écrivaine à succès sur le retour,  cultive son mal-être et multiplie les amants ;  ruinée, elle doit quitter Paris et vivre dans la dernière maison du village avec sa fille. La grand-mère,  Tina était   considérée comme une sorcière  dans la région. L’atmosphère y est d’ailleurs particulière, tout le monde se connait, et les villes histoires, les vieilles haines, les amours enfouies semblent ressurgir à tout instant sous les pas de Célia.

La jeune fille est pleine de rancœur envers sa mère et aimerait savoir pourquoi son père les a abandonnées, quelles relations a eus  Thomas,   bûcheron brutal et alcoolique,  avec  sa mère Catherine, pourquoi Cécile,  sa fille, se laisse brutaliser par lui et pourquoi elle emmène Célia dans la montagne au bord du lac noir. Là, les deux jeunes filles se déguisent en louves à l’aide de fourrures et courent nues,  la nuit,  à travers les bois.

Célia,  en cherchant la vérité,  rencontre d’autres personnages du village, Andréas, le frère de Cécile,  fabricant de papiers artisanaux qui a recueilli les secrets de Tina, la sorcière, Armand, le grand-père de Cécile,  qui pourrait avoir bien connu Tina. Peu à peu, le puzzle des évènements se met en place, à travers deux récits, celui du journal de Tina, disparu puis retrouvé et  celui de la vie au village de Clélia.

 Et, à travers ces deux récits,  rôdent des loups, les loups  exterminés au siècle dernier, réintroduits  et qui tuent des brebis, et puis les hommes-loups, c’est-à-dire aussi cruels que des loups,  ceux  qui tuent  et torturent des enfants, ceux qui tuent des réfugiés  de la seconde guerre mondiale et brûlent leurs camps, ceux qui lynchent le seul témoin de ce massacre en le faisant passer pour le tueur d’enfants et enfin,  nos deux jeunes louves-garous qui effraient les habitants au point que l’un d’eux meurt d’une crise cardiaque. La violence  meurtrière est omniprésente dans ce coin de montagnes,   de même que la violence sociale, la fermeture des entreprises, la  rudesse du travail de bûcheron ou de scierie, la xénophobie, la solitude, la peur de l’étranger…

Le seul défaut de ce roman captivant est sa trop grande richesse,  trop d’histoires, trop de morts,  trop de violence !