Chacun mon tour

Chacun mon tour
Didier Jean & Zad
Utopique 2023

Apprendre à  partager

Par Michel Driol

Une cour d’école maternelle et un seul vélo pour tous les enfants. L’héroïne attend son tour, pleure auprès de la maitresse, et quand son tour arrive, elle trouve que cela va trop vite. De dépit, elle jette le vélo par terre. Se sentant mal, elle va demander pardon à Luis, le suivant.

Apprendre à partager, c’est prendre en compte l’autre, et, quelque part, aller contre les tendances naturelles de l’enfant, qui veut tout pour lui, tout de suite. Mais c’est un enjeu important pour vivre en société. La situation présentée dans cet album, est de celles que l’on rencontre souvent avec les enfants. Le lieu, la cour de récréation, le contexte, moins de vélos que d’enfants, sont présentés ici avec réalisme et une certaine simplification (un seul vélo, des illustrations, un scénario et un texte sachant aller à l’essentiel) pour que l’album soit compris par les plus jeunes auxquels il s’adresse. Les auteurs font le choix d’un personnage de petite fille, narratrice, déterminée, et dont le langage est bien celui d’une enfant (c’est pas rigolo). Zad représente de façon expressive les divers sentiments qui la traversent (envie, plaisir, colère, honte). Tout est fait pour que le lecteur se reconnaisse et s’identifie à elle. Le seconde partie de l’album ne manque pas d’intérêt dans la façon de passer par l’exagération (exagération de l’illustration représentant le visage colérique de l’enfant) et la poésie. Ce sont les mains de l’enfant qui prennent l’initiative de devenir papillons pour aller se poser sur les épaules de Luis, belle façon de dédramatiser la honte et le pardon, parfois difficile à demander.

Malgré la simplicité de leur ligne claire, les illustrations présentent en second plan des enfants dans la cour, accrochés aux mains de la maitresse, en petit couple surmonté d’un cœur… dans des couleurs très lumineuses, rendant compte aussi de la diversité de ce qui se passe pendant une récréation.

Un album qui, avec humour, dans la bonne humeur, se veut éducatif, pour apprendre à partager, à sortir d’une situation de conflit, pour développer ce qui est essentiel à travailler dès le plus jeune âge : les compétences sociales.

 

La Baguette de Nanette

La Baguette de Nanette Mo Willems Kaléidoscope, 2017

Par Anne-Marie Mercier

Le scénario est  des plus simples : la petite Nanette va pour la première fois acheter une baguette à la boulangerie. Au retour, délectée par la bonne odeur du pain chaud, elle en croque en morceau, puis un autre, puis tout. Culpabilité, inquiétudes, envie de se cacher… mais sa Mamounette comprend et tout s’arrange. C’est une jolie façon de traiter des échecs des enf ants lors de certaines missions et de la compréhension nécessaire des adultes. C’est aussi un album plein d’humour, tant par le texte que par les illustrations. Le principe du texte est lui aussi très simple : il s’agit de finir la plupart des phrases en « -ette »  – Nanette, qui ressemble à une grenouille, est (comme la Verdurette de Boujon) entourée d’amies qui portent un prénom en  « -ette », à ceux-ci s’ajoutent les mots « bête », « emplette », « planète », « regrette »… et bien sûr celui de « baguette » qui revient de façon obsédante. Les illustrations sont faussement simples, mêlant images séquentielles, scènes imitant des cartes postales, décors de carton, esthétique de comics. Le quotidien est ainsi bien chamboulé et stylisé.