Le petit homme et Dieu

Le petit homme et Dieu
Kitty Crowther

Pastel, 2010

Le goût de l’omelette 

Par Anne-Marie Mercier

Le petit homme et Dieu.jpgPoursuivant son exploration philosophique, Kitty Crowther s’attaque à la question de la divinité. Non pas celle de son existence (Dieu existe, puisque Petit Homme le rencontre et lui parle), mais celle de sa nature, sa forme, ce qu’il peut et ce qu’il sait. Dieu affirme être un dieu parmi d’autres. A la demande de Petit homme, il est capable de prendre toutes les formes vivantes (on songe à l’ogre du Chat botté). Seule faiblesse, il ne sait pas grimper aux arbres, ni nager, et dit ne pas savoir ce qu’est une omelette.

Il accompagne le petit homme dans toutes ses activités  dans un décor aux allures de jardin d’Eden, rendant Théo heureux « pour l’éternité ». Cela dure jusqu’au moment où Dieu rentre chez lui, retrouver sa femme, pour lui faire une de ses fameuses… omelettes. Enfin, il se promène et se demande « si un jour il arrivera à grimper aux arbres comme Théo ». Le récit se retourne et on ne sait plus bien qui est le dieu de l’autre.

Si Dieu y perd sa barbe blanche, il y gagne en familiarité. Son allure ectoplasmique est fort sympathique. Petit Homme et Dieu, tous deux en majuscules (sauf dans le titre), sont à égalité, chacun dans son monde, mais avec en commun le goût de l’omelette.

Coulico

Coulico
Marie Assénat

Pastel, 2011

Vous avez dit étrange ?

Par Dominique Perrin

 Fantaisie narrative étrangement dépouillée et élaborée à la fois, Coulico procure l’impression d’une liberté d’affabulation relativement rare dans la culture contemporaine. On ne comprend pas clairement, sur un plan intellectuel, où va l’album, à quel rythme et pourquoi ; mais il importe sans doute davantage que s’y déploie un univers naïf et cohérent, qu’y naisse et évolue un personnage attachant de marginal-original ; et que la trajectoire de ce dernier soit fermement placée sous le signe épique de la reconnaissance du besoin de rêver et de faire rêver – tout simplement, sur la diversité indénombrable du vivant.

 

Le dîner

Le dîner
Michel Van Zeveren,
Pastel, 2011

Oui, mais la grenouille ?…

par Christine Moulin

Michel Van Zeveren est (entre autres) l’auteur du délicieux Et pourquoi ? (Ecole des Loisirs, 2008). C’est donc avec gourmandise que l’on ouvre son nouvel album, d’autant que le titre met en appétit. On est peut-être un peu déçu : bien sûr, le lapin est très, très mignon et ses oreilles très expressives. Bien sûr, on aperçoit toutes sortes de contes en filigrane : la maman lapin a un air de maman chèvre (Les sept biquets), les personnages s’empressent de transgresser tous les interdits qui empêcheraient l’histoire de se dérouler, il y a même une grenouille (qui restera grenouille…), un loup, un réfrigérateur, bref, tout le confort moderne.
Mais la chute, sans être mièvre, est un peu tiède.
Et puis, j’ai rencontré, à la lecture, un problème : comment se fait-il que la grenouille ne se soit pas enfuie avant, puisqu’elle savait comment faire ? Humm ? Comment cela se fait-il ? (Les lecteurs de cette chronique sont cordialement invités à me tirer d’embarras dans les commentaires ci-dessous ! Que ceux qui se voient contraints, de ce fait, de révéler la fin de l’histoire fassent bien précéder leur commentaire du traditionnel « spoiler »!!)