55 jours chez mon chat
Sébastien Mourrain
Editions de La Martinière, 2021
#confiné(e) avec mon chat
Par Christine Moulin
55 jours chez mon chat est une chronique sans paroles mais avec croquis, qui, malheureusement, est encore d’actualité, mais qui, heureusement, traite la situation avec un humour et une tendresse qui toucheront aussi bien les enfants que les adultes. Dès le titre, les amateurs de chats reconnaissent tout de suite qu’ils ont affaire à quelqu’un de sérieux qui sait de quoi il parle: il est évident que l’on habite chez son chat! Confinement ou pas confinement. C’est le cas de l’auteur qui a su regarder avec attention Moon, son hôte, et le présenter sous de multiples facettes: tantôt c’est un simple (?) chat qui regarde mélancoliquement le dehors dont il est privé, qui déterre les plantes vertes, qui balade sa souris dans l’appartement sans pour autant vraiment jouer avec elle, qui guette on ne sait qui derrière une porte, qui détruit un rouleau de papier toilette; tantôt c’est un compagnon qui partage et exprime les humeurs de ses humains, vautré sur un canapé, caché sous un lit, perché sur le lavabo ou sur le plan de travail; tantôt c’est un reflet (au sens propre, d’ailleurs, dans le dessin du jour 54), un double de ses « patrons », qui boit l’apéro devant une allocution présidentielle, déguste des cocktails, allongé sur une chaise longue, qui lit un livre, qui assiste à une session « Zoom » où se côtoient chiens et chats, qui constate qu’il a grossi, qui fait de la gymnastique, qui porte un masque; tantôt c’est une chambre d’écho de nos émotions (comme lorsqu’il se pend au lustre, à force d’ennui, sans doute, ou qu’il compte les jours…). A chaque fois, l’artiste trouve moyen d’évoquer avec justesse cette atmosphère si particulière du Premier confinement où se côtoyaient le plaisir d’activités intimistes comme la lecture ou le jeu, les efforts pour continuer à travailler un peu et le découragement, l’agacement. Il rend compte, sans un mot, de ce rapport au temps qui était si difficile et si spécifique, marqué par la répétition, l’insignifiance et l’attente (Moon, souvent, fixe des écrans noirs qui ne s’allument pas). La dernière image (tout en prônant ironiquement « le respect des gestes barrières ») célèbre la liberté retrouvée. Cet ouvrage est donc la démonstration éclatante du rôle de l’humour pour à la fois dire l’expérience commune, la mettre à distance et nous permettre d’en faire (presque!) un objet de future nostalgie.