Je serai cet humain qui aime et qui navigue
Frank Prévot, Stéphane Girel (ill.)
Hong Fei, 2016
« Homme libre, toujours tu chériras la mer ! » … et la poésie
Par Anne-Marie Mercier
Il faut de l’espace pour évoquer le temps, la mer, l’amour, le lien, les racines… L’album est généreux et propose un grand format et même, vers la fin, une quadruple page à déplier. Les dessins, stylisés, plantent un décor de verts et de bleus, qui tournent parfois à l’orangé et au rouge, violet : décor d’herbe, de mer, de nuages, et parfois d’horizons lointains et de motifs exotiques, où l’envers peut être l’endroit.
Sur la plage où il accompagne son grand-père chaque année pendant l’été, un enfant trouve un coquillage sur lequel est inscrite la phrase « écoute-moi ». Il y entend des sons étranges, des rythmes, qui peu à peu deviennent un langage inconnu, langage qu’il finit par traduire, d’abord pour dire le poème qu’est la vie de son grand-père, puis pour dire la sienne avant d’inventer un autre poème.
Ce tâtonnement à la recherche d’un sens à donner au langage poétique s’accompagne d’une interrogation sur les origines : l’enfant a pour ancêtres un marin européen et une femme originaire de Polynésie. A cette question qu’il se pose, il répond en fin de parcours avec le projet d’« être un humain », ce qui dit beaucoup, mais aussi un humain « qui aime et qui navigue », comme son grand père ; sera-ce sur la mer ou sur les vagues de la poésie ?
Ce narrateur est aussi un humain qui lit de la poésie, les références à des textes et auteurs connus étant nombreuses, sous la forme de clins d’œil, d’évocations plutôt que de citations et la question de l’écoute et de l’appropriation des sons, centrale.
L’histoire, comme les images, est dense, forte, et la magie du chant du coquillage prenante.