Un caillou dans la poche

Un caillou dans la poche
Marie Chartres
L’école des loisirs 2021

Une journée particulière

Par Michel Driol

Tino vit sur une ile, y fréquente la seule école, y rencontre les mêmes personnes, surtout des vieux. Il rêve. Si quelque chose seulement pouvait arriver, venir de la mer, ou surgir au milieu des fougères. En attendant, il passe son temps à mesurer toute l’ile, compter tout ce qu’il peut mettre en chiffres. Jusqu’au jour où, enfin arrive une classe de 25 élèves, du continent, venus visiter l’île, et où une  fillette de son âge, sujette au vertige, va l’entrainer dans une journée bien singulière, inoubliable.

Enfant solitaire, différent par ses activités, ses passions – les cailloux -, ses gouts, Tino va vivre une véritable éducation sociale et sentimentale. Lui pour qui seul comptait l’esprit de géométrie, dans sa façon de tout calculer, mesurer, noter, va rencontrer avec Antonia l’esprit de finesse. Ensemble, ils s’échappent du groupe pour découvrir l’ile pour l’une, découvrir l’autre pour le garçon, et partager des activités. Qui est vraiment Antonia ? Un mystère pèse sur elle, dont on ne saura que ce qu’elle veut bien raconter. Ses parents sont-ils vraiment des médecins humanitaires ? A-t-elle vraiment voyagé aux quatre coins du monde, à la différence de Tino qui ne connait que son ile ? Peu importe, ce qui compte, c’est la naissance d’une amitié, d’une complicité en milieu clos, de plus en plus en plus clos. Le regard est celui de Tino, regard porté sur le monde et, en particulier, sur les deux maitresses qui se partagent ce jour-là la responsabilité (ou l’irresponsabilité) du groupe d’enfants. Ces deux personnages sont de vrais personnages de comédie, traités sans ménagement par l’autrice (finalement pour le plus grand plaisir du lecteur !). D’autres personnages se distinguent de la masse des iliens, personnages caractéristiques et bienveillants comme le gros homme à vélo et la vieille dame pleine de bon sens, personnages qu’au fil de la journée Tino apprend à voir enfin. Les illustrations, très expressives, de Jean-Luc Englebert vont dans le même sens que l’humour du texte dans sa façon de croquer les personnages, et rendent sensible l’atmosphère bretonne de cette ile.

Un récit alerte, tendre, récit de la découverte de deux solitaires, qui apprennent petit à petit à arrondir les angles de leurs cailloux.