Câlin Express
Emile Jadoul
Ecole des Loisirs (Pastel), 2011
Marre des parents pressés !
par Sophie Genin
Emile Jadoul précise au début de cet album qu’il a été créé d’après une idée de son fils Edouard et on veut bien le croire tant les enfants et les parents (les papas, certes, mais aussi les mamans !) se retrouvent dans les personnages et les situations proposés. Comme dans le cas de toutes les réussites littéraires, il suffit de peu et si on résumait l’histoire qui nous est contée, cela pourrait donner : un papa toujours pressé ne prend jamais le temps de câliner son fils jusqu’au jour où ce dernier lui impose ce tendre moment.
Mais en écrivant cela, nous ne dirions rien de l’humour du texte (la notion de « PGV : papa à grande vitesse ») et de l’illustration (que dire du papa, cravate autour du cou, attaché case au sol et téléphone portable vissé à l’oreille mais en position pour un sprint, ou de ce même personnage, attachant, parlant dans l’appareil, faisant cuire des oeufs au plat et réussissant tout de même, du bout du museau, à embrasser son enfant?). Les personnages et les situations ne sont jamais caricaturaux car puisés dans la vie quotidienne mais transcendés par la Littérature telle qu’Emile Jadoul peut nous la proposer.
Merci à Edouard qui a sûrement inspiré une page qui fait à la fois penser à Grosse Colère de Mireille d’Allancé (double page rouge sang badigeonné en fond et enfant qui boude au premier plan) et au schtroumpf grognon (« moi, j’aime pas les câlins express. ») !
La couverture est attirante et son illustration, représentant une petite fille (reconnaissable uniquement à la barrette qu’elle a dans les cheveux !) qui court toute nue avec une culotte à petites fleurs rouges dans les mains, fait très envie ! Mais, par la suite, les hypothèses faites par les différents animaux qui trouvent cette culotte (bonnet pour lapin, couverture pour oisillons ou drapeau pour queue de souris), si elles font sourire dans un premier temps, n’empêchent pas l’impression de déjà vu.
Un moment important de la vie de tout enfant est raconté par Emile Jadoul qui excelle décidément dans cet exercice ! En effet, il dépeint avec réalisme, sans oublier la pointe d’humour permettant la distance nécessaire, une dispute entre une petite poule et une jeune cane. Le traitement délicat de l’histoire se retrouve dans les illustrations de Catherine Pineur, tout en flous colorés et visages très expressifs des protagonistes ailées. L’héroïne livre ses pensées avec l’exagération propre à l’enfance et l’écriture en « je » facilite l’identification du jeune lecteur connaissant sa première dispute. Cette fable se termine heureusement très bien : vous pouvez donc la mettre entre les mains de tous les querelleurs de votre entourage !