Sothik

Sothik
Marie Desplechin, Sothik Hok
Illustré par Tian

L’école des loisirs, 2016

Une enfance en enfer : Cambodge : 1975-1979

Par Anne-Marie Mercier

Marie Desplechin a rencontré Sothik Hok lors d’un voyage au Cambodge où elle aidait une association pour le développement de la lecture, Sipar. Sothik Hok lui a dit « avoir beaucoup de choses à raconter », mais « pas le temps de l’écrire », alors elle lui a proposé d’être sa plume, et il a raconté son enfance : né en 1967, dans un village, fils de parents sino-cambodgiens, il avait environ 8 ans quand les Khmers rouges ont commencé à contrôler le pays. Leur installation est racontée progressivement, dans un récit qui suit l’ordre chronologique, de même que leur chute quatre ans plus tard, avec les règlements de compte, les impunités, les retrouvailles aussi de ceux qui s’étaient perdus de vue pendant des années : familles séparés, personnes déportées, exécutions, enfants en camps de travail… La survie de Sothik et de sa famille est due à la présence d’esprit de son père, qui s’est débarrasse immédiatement de tous ses maigres biens pour vivre comme un paysan, et à la détermination de sa mère, à la solidarité de quelques-uns, à l’entraide à l’intérieur de tout petits groupes comme la troupe d’enfants à laquelle il appartient, chargée de travailler aux rizières ou chasser les rats, tuer les serpents.

Le récit de Sothik, raconté à la première personne, est pudique mais franc : il n’élude pas la dissolution des liens amicaux et familiaux, l’envie de faire plaisir aux chefs, le dédoublement qu’il vit en permanence, tantôt bon petit révolutionnaire, tantôt critique. La vie quotidienne, faite de travail et de privations est décrite précisément à travers les gestes, les objets, les vêtement… tandis que le durcissement progressif du régime décime encore plus les rangs, ceux des enfants comme ceux des adultes.

Allez donc voir le site de Sipar, association dont s’occupe Sothik, un beau travail dans un pays qui se reconstruit, où 9 enseignants sur 10 ont disparu dans les années de l’Angkar, assassinés ou morts de faim et d’épuisement.

La dernière reine d’Ayiti

 La dernière reine d’Ayiti
Elise Fontenaille
Rouergue doado, 2016

 

 

 Un génocide raconté aux jeunes

Par Maryse Vuillermet

 

 

 

la dernière reine d'Ayiti Image Elise Fontenaille aime croiser l’Histoire et l’ethnologie, révéler des génocides et, en même temps, faire revivre la culture perdue d’un peuple. Elle l’a fait pour les indiens Haidas dans La cérémonie d’hiver ( Rouergue 2010) pour les Héréros dans Eben ou le yeux de la nuit ( Rouergue 2015).

Dans ce récit, elle nous raconte la disparition,  en une seule génération d’un million de Taïnos, le peuple d’Ayiti, actuelle Saint-Domingue et Haïti.

Par la voix de Guaracuya, âgé de quize ans, neveu de la reine Anacoana, on assiste à la vie pacifique et féconde de ce peuple sur une ile paradisiaque. Ils étaient riches d’or, de nourriture mais surtout d’une très belle culture faite de croyances religieuses, mythologiques et de connaissances approfondies de la faune et de la flore.

Mais,  un jour,  arrivent trois bateaux, ceux de Christophe Colomb en 1492.

Toutes ces richesses sont convoitées par les Blancs, qui reviennent en nombre et asservissent les autochtones pour les obliger à travailler et ramener de l’or, violent les femmes ou tuent les récalcitrants et le pis,  c’est que tout cela se fait au nom de leur Dieu catholique.

Le récit n’est pas que d’horreur car la grande sagesse de ce peuple est d’avoir compris qu’il fallait transmette toutes sec connaissances avant de disparaitre et s‘allier avec les esclave noirs fugitifs qui se sont réfugies avec eux dans les montagnes. Ils sont su aussi créer une nouvelle religion à partir de trois religions, la leur,  celle des Africains et celle des conquistadors.

C’est un très beau récit initiatique, et instructif sur les Caraïbes, qui, malgré les horreurs décrites, sait conserver un espoir chez les jeunes lecteurs.