Ezima, ou le jeu des trois sauts

Ezima, ou le jeu des trois sauts
Didier Jean et Zad, illustrations de Lucie Albon
Utopique 2020

Comme un oiseau de passage

Par Michel Driol

Pendant les vacances de Pâques, Sybille, la narratrice, fait la connaissance d’Ezima, une migrante de son âge, qui lui apprend à jouer aux trois sauts. Mais lorsque l’école reprend, Ezima est en butte aux quolibets et rejets de Blanche, la meneuse, et Sybille n’ose montrer son amitié pour Ezima. Pourtant, lorsque cette dernière porte le pull que Sybille lui a offert, elle ose s’afficher à ses côtés, et devient à son tour cible de l’hostilité des autres. Certains vont pourtant rejoindre les deux fillettes, et jouer aux trois sauts. Mais, durant l’été, alors que Sybille est chez ses grands-parents, Ezima et sa famille sont partis pour le Canada, laissant un grand vide.

Ecrit à quatre mains par Didier Jean et Zad, ce court roman illustré aborde des thématiques très contemporaines, l’accueil des familles de migrants et le harcèlement scolaire, avec beaucoup de justesse et de sensibilité. Les deux auteurs ont fait le choix d’une fillette ordinaire, soumise à un dilemme : choisir entre son amitié pour Ezira et son appartenance au groupe. Rien d’héroïque dans cette fillette, qui assumera le choix du cœur pour ne pas laisser accuser son amie. Trois personnages se détachent dans cette histoire : Ezira d’abord, qui a traversé sans doute beaucoup de choses, et regarde avec un certain détachement et une certaine distance ce qui lui arrive, et dont la narratrice note l’accent chantant comme une marque de sa différence et de son originalité. Sybille, la narratrice, dont la vie est bouleversée par cette amitié, Sybille qu’on sent intégrée dans une famille, des routines comme les vacances chez les grands-parents, et qui sort transformée et grandie de ces quelques mois de sa vie. Blanche enfin, incarnation du racisme et de la xénophobie, leader de la classe, à laquelle personne n’ose vraiment s’opposer, mais qui disparait du roman et des préoccupations de la narratrice lorsqu’elle a trouvé le courage de s’opposer à elle. Ce qui frappe aussi dans ce roman, c’est la façon de raconter l’intégration, la xénophobie et le harcèlement à partir de petits détails et de quelques objets : trois bâtons, une règle cassée, un cahier déchiré, un pullover.

Les illustrations de Lucie Albon, traitées en ligne claire, donnent vie aux situations et aux personnages avec expressivité.

Un roman aux personnages touchant pour parler de l’amitié plus forte que le racisme et la xénophobie.

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