Enfant de la jungle

Enfant de la jungle
Michael Morpurgo
Gallimard jeunesse (folio junior), 2012

Mowgli du XXIe siècle

Par Anne-Marie Mercier

enfantdelajungleMichael Morpurgo sait réactualiser les mythes. Comme auparavant il avait mêlé dans Le Royaume de Kensuke, robinsonnade et souvenirs d’Hiroshima, il réactualise Le Livre de la jungle de Kipling en proposant des variations tirées de l’histoire de notre siècle. La guerre en Irak cause la mort du père du jeune Will, le tsunami qui tue sa mère et l’isole du monde, alors qu’il était parti en promenade à dos d’éléphant durant des vacances en Indonésie, évoque les images de la catastrophe de décembre 2004, tandis que ses démêlés avec des chasseurs d’Orangs Outans font référence au massacre des grands singes, toujours d’actualité, décrit par de nombreux films (dont Gorilles dans la brume (1989) de Michael Apted où Sigourney Weaver incarnait la célèbre éthologue Dian Fossey, assassinée en 1985).

Sauvé par une éléphante, accepté par les orangs outans, pourchassé par les chasseurs et réfugié dans une réserve (dont le modèle a été pris dans la réalité) animée par une femme au grand cœur, Will se trouvera devant un dernier dilemme : doit-il rentrer en Angleterre chez ses grands parents qui n’ont plus que lui ? ou entendre sa propre voix qui lui dit que le monde des humains ne vaut pas qu’on s’en occupe ?

La réponse de Morpurgo est à la hauteur de ces questions. Au XXIe siècle, Mowgli serait devenu tout autre que celui imaginé par Kipling.

Cet ouvrage reprend le grand format publié en 2010.

Loin de la ville en flammes

Loin de la ville en flammes
Michael Morpurgo

Traduit (anglais) par Diane Menard
Gallimard jeunesse (hors série littérature), 2011

Adieux à Dresde (avec un éléphant)

Par Anne-Marie Mercier

Michael Morpurgo,Gallimard jeunesse (hors série littérature),guerre,bombardement,éléphant,handicap,allemagneMichael Morpurgo poursuit son exploration de la deuxième guerre mondiale en prenant cette fois le point de vue des civils et des vaincus : une famille de Dresde, la mère, la fille de 16 ans et le jeune garçon handicapé de 8 ans (le père est au front) fuit la ville bombardée… accompagnée, et c’est la touche de fantaisie de ce roman sombre, de Marlène, une jeune éléphante.

Presque tout le récit relate leur marche épuisante dans les bois, la faim, la peur et l’angoisse. En chemin, ils rencontrent un aviateur canadien et le sentiment de haine est suivi par l’entraide et même l’affection et l’amour, très progressivement. D’autres rencontres sont lumineuses : d’autres réfugiés, une vieille châtelaine, une chorale d’enfants… tous séduits par Marlène.

Cette histoire est celle de la narratrice, la jeune Lizzie. Agée, en maison de retraite, elle raconte cela à son infirmière et au fils de celle-ci qui a cru tout de suite à son histoire d’éléphant dans le jardin.

Et c’est bien la position du petit Karl que Morpurgo nous demande d’adopter, celle d’une suspension totale d’incrédulité, parfois difficile (un éléphant dans les neiges allemandes de février, on a un peu de mal…). C’est tout le paradoxe d’un conte de guerre cruel.