Le petit bourreau de Montfleury

Le petit bourreau de Montfleury
Marty Planchais
Sarbacane, 2016

Ne touchez pas à la hache !

par Marion Mas

Cette bande dessinée raconte l’histoire d’un bourreau-peintre (bien plus peintre que bourreau en fait, car il n’a jamais exécuté personne), qui mène une vie paisible jusqu’à ce que le nouveau maire de la ville veuille faire état de son autorité en rétablissant peine capitale et exécutions publiques. C’est alors que les ennuis commencent pour le protagoniste. D’autant plus qu’il reçoit la visite de Louise, la fille du premier condamné à mort, qui le supplie d’épargner son père victime, dit-elle, d’une erreur judiciaire. Faut-il endosser l’héritage paternel ? Faut-il obéir à l’institution judiciaire lorsqu’on a la charge de bourreau et qu’on est sommé de tuer un innocent ? Tels sont les dilemmes que, allongé sous un arbre, le bourreau expose à Tiki, une chauvesouris douée de parole. Figure de la conscience aux allures de psychanalyste, la bestiole l’aide à s’orienter, et, finalement, à trancher.

Le style graphique, très expressif, sert un propos humaniste et plein d’humour. Jouant sur le grain du trait, l’auteur fait alterner des cases au dessin simple et efficace avec un travail plus élaboré sur les encres. Rappelant des aquarelles, ces cases soulignent les moments d’incertitude vécus par les personnages et rappellent la passion du bourreau pour la peinture, passion également évoquée à travers les références à van Gogh qui émaillent l’ouvrage.

Desolation road

Desolation road
Jérôme Noirez
Gulf stream Editeur, Courants noirs, 2011

Les routes ont toujours une fin  

Par Maryse Vuillermet

Desolation-Road imageBeau titre qui sonne comme un blues, couverture réussie,  et histoire prenante. Une jeune fille June attend son exécution dans le couloir de la mort. Un journaliste en mal de scoop, Gayle Hudson,   vient l’interroger  et lui faire raconter son histoire. C’est donc un dialogue, une histoire à deux voix, celle du journaliste assez distante et celle de June, très émouvante, assez oralisée. Elle raconte son amour absolu pour  David et comment elle a tué plusieurs fois pour rester avec lui, ne pas le perdre. C’est l’histoire d’une route semée de cadavres, de hold up de deux jeunes amateurs. David a d’abord tué son  père violent et alcoolique; elle a fui sa tante  et  a tué  un pompiste pour  protéger son ami.  Et ensuite, c’est l’escalade, ils enlèvent une petite fille pour un gros magnat de la prohibition mais sont piégés dans un village minier abandonné, en plein désert. Les gangsters  se croyant trahis, viennent les y retrouver et c’est un bain de sang.

 L’histoire est tragique car l’engrenage est très puissant, ils tuent à chaque fois par erreur, impréparation, pour se sortir de pièges et croient toujours qu’ils vont pouvoir fuir et vivre ensemble au bord de la mer.  Leur amour est leur seule certitude et leur seule valeur.

Ils circulent dans l’Amérique de la grande crise en Ford  T, ils côtoient les hobbos, les prédicateurs véreux, les familles qui ont perdu leur maison,  les chômeurs, les noirs et des gangsters de la prohibition.

On pense à En un combat  douteux de Steinbeck  et le motif de la condamnation à mort est traité de façon originale car June souhaite mourir pour rejoindre David, déjà exécuté.

Mon père est américain

Mon père est américain
Fred Paronuzzi
Editions Thierry Magnier, 2012

 A la recherche du père

Par  Maryse Vuillermet

 

Léo, adolescent vivant près de Grenoble,  est en plein désespoir. Il  croyait qu’il était le fruit d’un amour de passage entre sa mère et un Américain. Elle n’avait jamais répondu à ses questions, il n’avait de lui qu’ une photographie. Or, il découvre qu’elle lui envoie de l’argent tous les mois et qu’elle est en relation  avec lui. Léo se sent plus que trahi. Il ne va plus au lycée, ses amis craignent le pire. Enfin, grâce à eux, il rentre chez lui et sa mère lui raconte tout. Elle a retrouvé son père par hasard…dans le couloir de la mort aux USA. Et elle a décidé de l’aider.

Après une difficile réflexion, Léon décide de donner une seconde chance à ce père.  Il lui écrit et …son père lui répond, lui explique toutes ses erreurs. S’en suit une correspondance très belle entre le père et le fils qui tentent de se connaître. Entre temps,  pour les amis de Léo aussi, la vie s’accélère,  Ben tombe amoureux d’Andréas, un garçon et est enfin lui-même et Léo accepte   l’affection d’Esther   qui se transforme en un sentiment plus fort.

Ce roman m’a plu : la recherche du père avec ses souffrances et ses joies, la  découverte de la vie très libre des jeunes des années 70, la vision de l’intérieur  de la vie dans les prisons américaines, de l’horreur de la peine de mort, le ton  juste, certains clins d’œil à la vie du lycée ( l’auteur est enseignant)  en font un ensemble assez riche pas du tout manichéen, et qui se lit très agréablement.