C’est bien ma chance

C’est bien ma chance
François David
Calicot 2023

Une déclaration

Par Michel Driol

Timmy, le narrateur, voudrait bien attirer l’attention de Mei, une élève d’origine chinoise, qui fréquente le même collège que lui.  Il commence par apprendre quelques mots de chinois, puis à en calligraphier quelques-uns, jusqu’au jour où Mei lui donne un baiser. Il est alors la victime de harcèlements racistes. Découvrant, par hasard, la date de naissance Mei, il lui offre des pensées, qu’elle lui jette à la figure, avant de l’ignorer. Lorsqu’il la sauve sur un passage piéton, elle lui avoue qu’elle est daltonienne, et qu’avant de comprendre que les pensées sont bleues, elle les a vues jaunes, couleur qu’on n’offre pas à une fille, en Chine.

Ce court roman vaut d’abord par la singularité de son narrateur, qui calcule souvent les chances de réussir de ses entreprises en termes de probabilités, peut-être comme un façon quasi magique de se rassurer ou de surmonter sa timidité. A partir de cette tendre  histoire d’amour naissante, l’auteur aborde, sans s’y appesantir, différents sujets. Le harcèlement scolaire, sur fond de racisme latent, manifestation aussi qu’à cet âge-là celui qui ne ressemble pas au groupe, ne se conforme pas à ses règles tacites est exclu, voire frappé. C’est aussi la question de l’interculturalité, avec cette relation entre une orientale et un occidental, au-delà de la différence de langue orale et écrite. C’est enfin la question d’un handicap, celui du daltonisme, source de malentendus mais aussi de mise en danger de celui qui le porte. Le tout est traité avec ce qu’il faut d’autodérision, de crainte, d’humour et d’espoir pour que l’on s’intéresse à ce sympathique personnage de narrateur qui cherche à comprendre et à être reconnu avant de juger.

Un roman d’initiation amoureuse, facile à lire, qui soulève avec humanité  bien des problématiques auxquelles les adolescents d’aujourd’hui sont confrontés.

La Nuit de Valentine

La Nuit de Valentine
Hélène Vignal et Isabelle Carly
Le Rouergue, 2011

Grandir et s’épanouir quand on est introverti

par Sophie Genin

9782812602016.gifValentine est une petit fille sage, très sage, trop sage. Au fur et à mesure d’un texte énigmatique qui présente une héroïne très timide qui aurait envie mais attend que le monde vienne la chercher, on sent croître le malaise jusqu’à la fameuse nuit qui donne son titre à l’album. Une nuit où tout devient possible pour Valentine, sa nuit !

Le texte, volontairement elliptique sur les causes psychologiques de l’attitude de l’enfant, est tiré vers le rêve par des illustrations oniriques mêlant dessin et collages colorés. L’univers visuel semble être une voie/x différente proposée au lecteur qui peut, à sa guise, remplir les blancs de l’histoire. Cet album particulier, comme souvent au Rouergue, résonnera différemment chez les lecteurs car il faut, pour l’apprécier, accepter de suivre l’auteur et l’illustratrice sur un chemin mystérieux, voire inquiétant parfois… Il faut accepter aussi de rester avec de nombreuses questions sans réponses à la fin de la lecture…