Je pense, j’aimerais

Je pense,
Portraits de Ingrid Godon, avec les textes de Toon Tellegen,
La joie de lire,

J’aimerais
Portraits de Ingrid Godon, avec les textes de Toon Tellegen,
La joie de lire,

Par Claire Damon

Puissants Je pense _sont les textes poétiques et philosophiques de Toon Tellegen parce qu’ils parlent vrai. Ils mettent en mots simples des pensées non formulées, des sentiments profonds.

«  Je pense parfois que tout le monde sait quelque chose que je suis la seule à ne pas savoir.

C’est pourquoi on me regarde d’une façon si bizarre.

Je suppose J’aimerais_que ça se lit sur mon visage.

Peut-être me l’expliquera-t-on juste avant ma mort.

Pour ne pas que je meure idiote. »

Dans ce magnifique recueil, l’auteur néerlandais connu et reconnu explore la pensée. Le dialogue s’engage entre les textes et les images qui semblent des esquisses, des suggestions. Sous l’apparence d’un carnet de croquis, cet ouvrage abouti dévoile une galerie de portraits qui nous regardent, nous scrutent, nous parlent.

L’infinie exploration graphique d’Ingrid Godon encourage en écho l’exploration par le lecteur de sa sensibilité. Il faut oser plonger dans cet exceptionnel album.

Dans J’aimerais, publié en 2013, Toon Tellegen se penchait sur les mystérieux visages peints par Ingrid Godon leur attribuant des pensées intimes, des questionnements.

 

 

 

Qui a piqué le courrier des élèves ?

Qui a piqué le courrier des élèves ?
Nicolas de Hirsching, Fanny Joly
Casterman, 2013

Les jolies colonies de vacnceeeuuuuhhhh

Par Anne-Marie Mercier

Qui a piqué le courrier des élèves ?Les auteurs ont reproduit le procédé de leur ouvrage précédent : Qui a piqué les contrôles de français ? : fac-similé de travaux d’élèves annotés en rouge par l’enseignante.

Même principe caricatural, mais situation différente. Ici, il s’agit d’un atelier d’écriture et d’informatique pendant une classe verte : les élèves devaient envoyer un courrier à divers membres de leur famille. Ils développent tous les clichés liés aux séjours en collectivité : mauvaise nourriture, confort approximatif, blagues entre enfants, mauvais caractère des adultes. Les textes proposent différents types de lettres de vacances : sibyllines, romanesques, goguenardes, hypocrites… Quant à l’enseignante, elle est elle aussi un personnage caricatural, tant dans ses commentaires sur les textes des élèves que dans ses courriers personnels. Pour les amateurs de perles de cancres, c’est savoureux, un peu moins cependant que l’ouvrage précédent – ou bien la surprise joue moins.

Monsieur Hulot à la plage

Monsieur Hulot à la plage
David Merveille (d’après J. Tati)
Rouergue, 2015

Images fixes

Par Anne-Marie Mercier

Monsieur Hulot à la plageInspiré très fortement par les vacances de M. Hulot, cet album en multiples tons de gris, sans texte, en retrace une journée, du matin au soir.

On y retrouve de multiples clins d’œil au film : le bateau en deux moitiés, des personnages, le restaurant de l’hôtel, des situations… L’allure de Hulot, sa silhouette raide et son pas élastique sont magnifiquement rendus.

A quel genre d’enfant proposer ce livre ? A un grand, amateur de longue date de Tati qui aimera voir une version en images « fixes », ou à un enfant qui serait sensible à cet humour dès son plus jeune âge, s’il existe ?

Montagne en ballade

Montagne en ballade
Benoit Audé
Rouergue, 2014

L’infini du temps et de l’espace (ou presque)

Par Anne-Marie Mercier

Montagne en balladeUne montagne est invitée par ptérodactyle postal à l’anniversaire de son cousin le volcan. Elle part, à travers temps et espace, continents et civilisations (Egypte, Japon médiéval, Amérique des Cow Boys, ville d’aujourd’hui, ville du futur, pour enfin retrouver sa place.

Dans l’espace blanc de la page, le tout est crayonné en tout petits dessins caricaturaux, les paysages esquissés, il y a beaucoup à voir et à reconstruire…

Histoire de la petite dame qui aimait le bruit

Histoire de la petite dame qui aimait le bruit
Val Teal, Robert Lawson
Traduit (anlais, USA) par Camille Gautier
Autrement (Vintage), 2015

Vive le son,  vive le son !

Par Anne-Marie Mercier

Histoire de la petite damePublié en mars 2015, cet album est sans doute le dernier de la collection Vintage d’Autrement : cet éditeur a arrêté son secteur jeunesse depuis.

Et c’est bien dommage, notamment pour cette collection qui avait fait reparaître Livre de Mc Cain et Alcorn et qui donne à la petite dame qui aimait le bruit, publié pour la première fois en 1943, une nouvelle jeunesse.

En deux mots, une dame quitte la ville pour s’installer dans une ferme. Le bruit lui manque : elle fait venir successivement une vache, un chien, un chat, des poules, des oies, etc, jusqu’à un tacot pétaradant qui la ramène en ville où elle découvre une autre source de bruit qui lui manque encore : des enfants ! Hop, elle en enlève deux et son bonheur est parfait et sa tranquillité nulle.

Chaque page présente la nouvelles acquisitions dans un beau dessin à l’encre et quelques zones de couleurs (jaune, rouge, rose, noir). Dans le texte, sur la page de gauche, les onomatopées s’accumulent en lettres rouges, la lisibilité et l’esthétique sont parfaites, l’histoire réjouissante, une belle leçon pour les anti-bruits !

Animanège

Animanège
arno, Renaud Perrin
Rouergue, 2014

Métamorphoses graphiques

Par Anne-Marie Mercier

AnimanègeDans l’espace blanc de la page, des animaux jaunes et bleus passent : tigres, pigeons, dromadaires, vaches, tortues, escargots… ils laissent au passage leurs accessoires, bleus : rayures, taches, cornes, carapaces, ailes, bosses… et repartent avec ce qui reste de leurs leur corps, jaune. Les formes bleues déposées forment un paysage.

Ils reviennent et s’affublent de ce qu’ils trouvent le tigre prend les pics du porc-épic et devient lion, les tortues deviennent pangolins, les cerfs antilopes… tous repartent avec leurs nouveaux ornements, seuls deux pigeons sont les dindons de la farce.

Album jeu, puzzle, espace de métamorphoses à reproduire à l’infini grâce à un (simple?) jeu de tampons.

Fatale Spirale

Fatale Spirale
Fabrice Vigne, Jean-Baptiste Bourgois (ill.)
Sarbacane, 2015

Adieu à 2015 : un programme pour 2016 ?

couv-Fatale-spiraleLe ton est au constat amer : l’irréparable s’est produit, et par contamination la ville, le pays, la planète entière ont basculé dans… la fraternité.

Fabrice Vigne inverse l’idée selon laquelle la violence engendre la violence et que «tôt ou tard l’ancienne violence engendre la violence neuve», comme le dit la phrase d’Eschyle placée en exergue au volume. Chaque double page montre une étape dans cette évolution scandaleuse qui inquiète les politiques et met en cause les valeurs traditionnelles de la France, « nation éternelle de la chamaillerie, du sarcasme, du mépris, du préjugé et de l’humeur massacrante ». Comme c’est vrai…

Haut les cœurs, et partageons l’optimisme de Fabrice Vigne qui cite Gramsci  : « le pessimisme de l’intelligence contre l’optimisme de la volonté », dans une page de son blog  datée du 9 novembre 2015, donc après le 7 janvier et juste avant le 13 novembre, à l’occasion d’une rencontre avec une classe dans un collège grenoblois. Oui, on le voit dans ses propos, les écrivains font partie des remparts contre l’obscurantisme, la bêtise et la violence qui en découle.

Fabrice Vigne est l’auteur de Les Giètes (Th. Magnier, 2007) et de TS (l’ampoule, 2003), magnifiques et a mené l’aventure éditoriale des éditions du Fond du tiroir jusqu’en novembre 2015.

Une (ou deux) fois n’est pas coutume

Une (ou deux) fois n’est pas coutume :

C’est la deuxième fois que nous postons un texte d’actualité non strictement littéraire, peut-être y en aura-t-il d’autres?

Brigitte Morel Éditions des (Grandes Personnes), nous écrit :  » Le livre de Janne Teller paru en 2012 est malheureusement d’actualité.
Et d’une grande efficacité pour expliquer aux adolescents ce que peuvent endurer les migrants… » Oui, je pense à ce livre constamment, le connaissez vous? Si non, voici la recension que j’en avais faite, « avant ».

Guerre. Et si ça nous arrivait ?

Guerre. Et si ça nous arrivait ?
Janne Teller
Illustré par Jean-François Martin
Traduit (danois) par L W. O. Larsen
(Les grandes personnes), 2013

Comment peut-on être réfugié ?

Par Anne-Marie Mercier

Guerre-GP« Et si aujourd’hui il y avait la guerre en France… Où irais-tu ? » Tout ce petit livre est dans cette question-programme.

Imagine, dit le livre au lecteur, imagine la France gouvernée par un régime autoritaire et tentant d’imposer sa loi à l’Europe. Imagine les démocratie libres du nord liguées contre elle et ses alliés du sud, la guerre, les maisons détruites, des personnes emprisonnées, le pays déstructuré, la terreur, le froid et la faim : où aller ? Le récit raconte au lecteur son itinéraire possible. Réfugié avec sa famille au Moyen Orient, mal accepté dans un pays dont il ne parle pas la langue, d’une culture et d’une religion différente, qui se méfie de la sienne, il ne peut pas faire d’études, doit se résigner à des emplois qui le rebutent ; il rêve de retour, mais le pays qu’il a quitté ne veut plus de lui.

Janne Teller a transposé le quotidien banal d’un réfugié en se contentant de décaler les situations et de faire vivre (par le tu et le vous : le texte est écrit du début à la fin à la deuxième personne) cela par ceux qui regardent les choses de l’extérieur. La forme du livre est-elle même exemplaire : il imite le format et la couverture d’un passeport européen ; les dessins stylisés illustrent la simplicité et la rigueur de la situation.

Un tout petit livre, un grand choc et une belle leçon.

Voir la présentation par l’auteur 

Le 1er…

Le 1er… c’est canard
Olivier Douzou
Rouergue, 2014

Petite merveille !

Par Anne-Marie Mercier

Un canard, sur la page de couverture, c’est le canard_douzou_couv_mpremier forcément. Mais non, le livre est conçu comme une succession et l’on voit sur la page de gauche qui suit le même canard barré : « non, non quelqu’un est devant canard », tandis que sur la page de droite on lit sous l’image d’une oie « C’est oie la première à ce jeu ».

« C’est moi, dit-elle »… et tout l’album est à l’avenant : jeux de mots, clins d’oeil (à Alice avec le lapin consultant sa montre, à La Fontaine avec le renard et le fromage, etc. ), questions de logique (avec l’œuf et la poule), inversions, … Une inventivité infinie pour un album infini : la dernière de couverture s’enchaine avec la première pour un éternel recommencement qui convient parfaitement à ces animaux à l’allure de jouets mécaniques défilant sur des pages qui proposent un circuit fléché.

voir l’article de Sophie van der Linden

Bimbi

Bimbi
Albertine
La Joie de lire, 2014

Enfances croquées

Par Anne-Marie Mercier

 BimbiSous la forme d’un beau carnet de croquis grand format, au papier crème et aux bords arrondis, Albertine présente des situations variées et simples : être avec (ou ne pas l’être), demander, tenir la main (ou la jambe), tirer, pousser, regarder (ou ne pas regarder), combattre ou discuter, toutes sortes de mini récits que le lecteur nourrit de ses propres souvenirs et sensations.