Marcel et Giselle

Marcel et Giselle
Natali Fortier
Le Rouergue 2015

La légende de la cabane à sucre

Par Michel Driol

marcel-et-giselle-413x600C’est l’histoire d’Eustache, un bucheron désœuvré, car il n’y a plus d’arbre à couper. C’est l’histoire de ses deux enfants, Giselle et Marcel. C’est l’histoire d’une vétérinaire, Marguerite, et c’est enfin celle d’une ogresse-cantatrice-chanteuse de blues, Armande. Giselle et Marcel s’enfuient dans la forêt pour échapper à une vie avec Marguerite, au milieu des serpents… Au cœur de la forêt, tout en semant leurs petits cailloux blancs, ils découvrent des arbres et des fleurs en sucre puis la maison d’Armande, cantatrice dont la voix s’était arrêtée et qui recherchait le remède miracle à partir de la sève sucrée des arbres. Mais Armande est ogresse, et prépare à l’aide de Giselle la bain de sève pour Marcel tandis qu’Eustache et Marguerite suivent les traces des fugitifs… jusqu’au moment où le gui avale l’ogresse, avant de la recracher, adoucie… Dès lors la maison devient cabane à sucre, où tous les personnages s’installent tandis qu’Armande y chante le blues à vous fendre l’âme.

On aura, bien sûr, reconnu le Petit Poucet ainsi qu’Hansel et Gretel dans une version polyphonique aux accents – et aux mots – du Québec. Chaque personnage raconte une partie de l’histoire, dans cet album qui se présente comme un échange entre le père et ses enfants, dans une forme très proche d’un théâtre qui ferait alterner de longues répliques. Le vocabulaire et la syntaxe – orale – du Québec sont bien présents, sans toutefois gêner la compréhension d’un enfant non-Québécois. La langue se veut très musicale, et semble appeler la mise en voix.

Les illustrations collent au texte, et elles renforcent l’étrangeté des lieux : la forêt, d’abord magique, devient vite le lieu du cauchemar, avant d’être celui du rêve sucré. Les pages sont peuplées de créatures et d’animaux : souris, insectes, oiseaux étranges. Même les arbres prennent des visages humains, avant une dernière double-page montrant hommes et nature réconciliés tandis que tombe la neige. Le pays est devenu de Cocagne…

Bel objet hybride entre l’album et la pièce de théâtre qui propose une savoureuse réécriture de contes à l’accent du Québec

Hansel le gourmand et Gretel la courageuse

Hansel le gourmand et Gretel la courageuse
Librement adapté des frères Grimm
Kimiko, Margaux Duroux
L’école des loisirs (Loulou et cie), 2014-12-16

Grimm au sucre

Par Anne-Marie Mercier

 

Parlons d’abHansel le gourmandord image, car c’est le côté séduisant de cet album : les personnages sont représentés par de petites figurines représentant des animaux anthropomorphes. Les photos sont lumineuses, et mettent en valeur le brillant et l’acidulé des bonbons, sucres d’orge, berlingots… Ces bonbons sont partout, très attirants, contrairement à ce qui se passe dans le conte où l’horreur de la situation des deux héros leur fait oublier ce qui les a piégés.

Tout est sucré dans cet album : le frère et la sœur ne sont pas abandonnés mais se sont perdus ; Gretel ne jette pas la sorcière dans le four, mais lui vole la clef de la cage où est retenu Hansel… Quant au titre, qui veut mettre l’héroïne en valeur, pourquoi pas, mais pourquoi tout dire à l’avance ?

Est-ce bien nécessaire aussi de proposer un classique de l’enfance déformé et dévitalisé ? Le charme de cette histoire, c’est son horreur : autant raconter autre chose si on veut s’adresser à de jeunes enfants sans leur faire peur.