Dis-moi ma vie Pierre Seghers

Dis-moi ma vie 
Pierre Seghers
Editions Bruno Doucey, coll. Résistances, 2019

Un bilan en images fiévreuses

Par Maryse Vuillermet

Bruno Doucey décide de republier un court recueil du fondateur des fameuses éditions  Poètes d’aujourd’hui.
Ces pages sont un bilan, un travail d’introspection qu’adresse le poète, dans un dédoublement onirique,  à sa propre vie. Il  y retrace,  à travers des images somptueuses,  une vie dévouée à la poésie et aux poètes mais aussi une vie de découvertes et d’émerveillements.

 

« Dis-moi, ma vie, t’aurais-je traversée en songe comme un nuage
Survolé de haut, toujours trop pressé pour te voir
Ou bien toi-même aurais-tu dérivé comme ces îles imaginaires
Ces Orénoques arrachées avec leurs arbres pleins d’oiseaux ?

Nous sommes-nous jamais rencontrés ? Dis-moi, ma vie
T’ai-je rêvée de temps en temps, t’ai-je tenue dans mes mains d’homme
A travers les saisons qui nous regardaient passer, toi et moi »

« Nous buvions le vin dans de grands verres
Embués, jamais vides, notre vin permanent
Et, dans nos mains, d’autres poitrines
Se laissaient caresser pour éblouir le vent. »

Un temps pour tout

Un temps pour tout
Lucile Lux
Soc et Foc, 2014

Avec le temps…

Par Christine Moulin

 Dans ce petit album au format de presque carnet, le texte égrène une liste (Il y a des secondes, des minutes, des jours etc. où…) qui s’éclaire grâce aux illustrations, faites de dessins et de collages: par exemple, les minutes où l’on se sent « abominablement seule », ce sont celles où l’on voit, à l’arrêt d’un bus, des mères et leurs enfants, visiblement heureuses et épanouies. Chaque page permet au lecteur (mais il est vrai plutôt à la lectrice, adulte, il est vrai aussi) de se reconnaître et de se sentir moins incompris avec ses émotions, ses sentiments, ses déceptions, ses joies et ses tristesses. Cet ouvrage est donc précieux, au-delà de son apparence ténue et discrète. Cela dit, on peut penser qu’il parle plus aux trentenaires qu’aux enfants ou même aux adolescents (sans toutefois être hors de leur portée), à l’instar d’un album dont on peut le rapprocher, J’attends, de Davide Cali.

Quand j’étais petit

Quand j’étais petit
Mario Ramos

L’école des Loisirs (Pastel), 2011 (réédition, première édition 1997)

Un album sans texte à portée philosophique

par Sophie Genin

9782211043229.gif Sur la quatrième de couverture de cet album animé qui ne paie pas de mine au premier abord, on trouve une citation de George Bernard Shaw (écrivain irlandais ayant obtenu le prix Nobel de Littérature en 1925) :

« Beaucoup de gens ne sont jamais jeunes ; quelques personnes ne sont jamais vieilles ».

En effet, chaque double page de cet album sans texte s’éclaire à la lumière de ces mots : sous l’animal adulte (toujours humanisé), on découvre l’enfant qu’il a été : la maman chat à la fenêtre qui ne voit pas les souris les chassait petite, le lion sans abri qui fait la manche se déguisait en roi, le rhinocéros bougon qui part au travail en costume s’asseyait dans l’herbe et jouait avec les petits oiseaux… Ils ont tous changé, et pas forcément en bien, sauf la girafe, déjà curieuse petite et l’éléphant artiste de la couverture, comme un double de Mario Ramos (qui semble dire : « quand j’étais petit » !). Petit, l’éléphant peignait déjà… sur les murs !
Ce bel album, simple et pudique, est à mettre entre toutes les mains, des petits mais surtout des grands, histoire de se poser quelques questions sur l’éducation, l’avenir, l’évolution des rêves d’enfance, ce temps de latence où tout était possible, avec un peu de nostalgie ? oui, aussi !