Quand les escargots vont au ciel

Quand les escargots vont au ciel
Delphine Valette – Illustrations de Pierre- Emmanuel Lyet
Seuil Jeunesse 2020

A l’enterrement d’un escargot/ Trois enfants s’en vont

Dans le parc avec Rachel et Amin, Alice écrase malencontreusement l’escargot que les trois enfants comptaient nourrir, adopter… A quoi jouer désormais ? A enterrer l’escargot. Mais quels rites employer pour la toilette funèbre ? Vers où tourner sa tête ? Et quelles prières dire ? Car Amin est musulman, Alice catholique et Rachel juive…

Voilà un roman qui aborde avec beaucoup de légèreté et de sérieux des problématiques graves, sans se départir du regard des enfants sur les mystères dont ils parlent : mystère de la mort, mystère des  rituels, mystère de l’amour aussi. Tout cela avec une évidence qui ne va pas sans évoquer Debussy, et ses Children’s corner. Car c’est un bel après-midi dans un parc, où l’on s’ennuie un peu, où l’on évoque des secrets sur les amoureux que l’on a, sur les escargots qui sont hermaphrodites. C’est un roman qui parle de religion et de laïcité avec un angle original, celui de la mort, et qui confronte trois rituels liés à ce passage, trois rituels plus ou moins connus par les enfants, qui n’ont pas vraiment tous eu l’occasion d’assister à des funérailles. Se pose alors la question de la meilleure façon d’enterrer l’escargot, dont, bien sûr, on ignorait la religion. C’est le grand père de Rachel qui apporte à la fin du roman la possibilité de vivre ensemble, d’abord en évoquant le fait de l’athéisme, puis en proposant que chacun prie à sa façon, multipliant ainsi les chances de l’escargot d’aller au paradis. Le roman est écrit en faisant la part belle au dialogue, et l’on se dit qu’une adaptation théâtrale serait bienvenue, et somme toute facile à faire. L’important est en effet ce que se disent ces personnages qui ont une réelle épaisseur, sont bien individualisés, parfois un peu stéréotypés dans leurs réactions, ce qui les rapproche des lectrices et lecteurs. C’est un roman d’initiation, d’initiation à la vie, à la mort, mais aussi à l’amour et aux relations entre filles et garçons, traitées ici avec subtilité.

De la jaquette du livre, une affiche grand format, aux illustrations pleine page ou de petite taille, les couleurs de Pierre-Emmanuel Lyet éclatent, pleines de gaité et de joie. Ses personnages sourient toujours, façon de dédramatiser la mort dont il est question ici.

Un roman original qui aborde la question de la laïcité et des religions au travers des rituels mortuaires, en montrant bien ce que les enfants en comprennent, et comment ils peuvent vivre ensemble. On se souviendra longtemps de cet après-midi ensoleillé au parc, et l’on saura qu’il n’est rien de plus sérieux, pour les enfants, que le jeu pour apprendre à vivre…

 

Le Sandwich au jambon

Le Sandwich au jambon
Marie Tibi – Delphine Berger-Cormuel
Utopique 2017 – Collection Alter Egaux

Diversité culturelle dans la Galerie de l’Evolution

Par Michel Driol

Visite de la classe à la Grande Galerie de l’Evolution, et, au moment du repas, Mehdi s’aperçoit qu’il a pris le sac de sport de son frère. Tout le monde veut bien partager son sandwich avec lui… mais pâté, saucisson, jambon, Mehdi n’en mange pas. C’est une petite fille juive, Deborah, qui partage son énorme sandwich au thon avec Mehdi. Et les deux enfants d’évoquer les nourritures familiales, falafels et slata méchouia, avec promesse d’invitation mutuelle. La discussion s’oriente alors vers les pratiques religieuses et culinaires des uns et des autres avant de reprendre la visite du musée, et d’y découvrir que nous faisons tous partie de la grande famille des animaux.

Le message est clair : il s’agit bien sûr d’accepter et de respecter l’autre dans ses différences, pour découvrir quelles valeurs nous rassemblent, au-delà de ces différences. Sans didactisme ou moralisme, le sujet est traité par le dialogue, l’album donnant la plus grande part à la parole des enfants qui échangent sur leurs habitudes religieuses et familiales, et celles d’autres pays où ils sont allés. Les illustrations, qui font alterner enfants, nourriture et animaux, apportent un contrepoint humoristique : terreur des enfants devant le tigre à dents de sabre, ou homo sapiens mangeant sa tablette de chocolat.

Sur un sujet brulant dans notre société, un album positif qui permettra d’aborder  la notion de diversité culturelle.

Cité Babel, Le grand livre des religions

Cité Babel, Le grand livre des religions
Pascale Hédelin, Gaëlle Duhazé

Les éditions des éléphants, 2015

Religions en voisinage

Par Claire Damon

Cité Babel, Le grand livre des religionsLudique et passionnant, l’album Cité Babel se présente sous la forme d’un immeuble de plusieurs étages. Au rez-de-chaussée se trouve l’épicerie de Monsieur Félix qui est athée, au premier étage vit une famille catholique, au deuxième, une famille juive et au troisième, une famille musulmane.

Cette forme – avec des pages découpées qu’on tourne au gré du hasard et des envies – est le coup de génie de l’album. Jamais rébarbatif, ce documentaire fait découvrir au fil des saisons les temps forts, les rites, les fêtes et les traditions païennes et religieuses. Comme au sein de l’immeuble, ces habitudes et ces croyances se superposent, se respectent, s’invitent et se questionnent. Le vivre ensemble en ressort comme une évidence.

Princesse des os

Princesse des os
Charlotte Bousquet
Gulf Stream, 2010

Rome   est une ville comme les autres

Par Maryse Vuillermet

princesse des os imageEnfin une Rome antique vivante, dépoussiérée, puante (comme Paris dans Le  Parfum de Süskind),  et très dangereuse.  Le crime organisé, ou crapuleux,  sévit à tous les étages de la société. La superstition, la corruption  et les pratiques de magie et de sorcellerie sont utilisés par pauvres et riches.  Les rumeurs circulent, les réputations se  font et se défont.

 En plus d’être un bon policier avec un suspens assez bien ménagé,  ce roman est une formidable leçon d’Histoire, sur les premiers chrétiens,  les gladiateurs, les paris tenus sur les courses et les combats, les esclaves,  le quotidien des Romains, leur repas, leurs vêtements, leurs pratiques religieuses, leurs commerces, …

L’héroïne,  Lucretia,  orpheline de père, maltraitée par son beau-père et sa mère,   qui veulent la marier sans son consentement, cherche qui a enlevé un petit garçon de sa maison,  son seul ami.  Aidée de ses deux esclaves, une jeune Syrienne et un ancien  gladiateur mauritanien, elle parcourt la ville, ses  bas-fonds,  armée de son intelligence et de son  courage.