Fil de fer
Martine Pouchain
Flammarion Jeunesse 2017
Sur les routes de l’exode
Par Michel Driol
Juin 40. Gabrielle, surnommée Fil de fer, 15 ans, doit quitter avec ses parents la ferme familiale, en Picardie, pour se réfugier en Bretagne. C’est le récit de ce périple, des attaques d’avions allemands, de la fatigue, des colonnes de réfugiés sur les routes qu’elle fait. En chemin, elle rencontre un jeune homme, seul survivant de sa famille, et tombe amoureux de lui. Puis c’est l’arrivée en Bretagne, la découverte d’autres personnes, et enfin le chemin du retour vers la Picardie. Récit historique dont l’auteur explique, en postface, que le point de départ est l’histoire vécue par sa propre mère, mais qu’elle a ensuite laissé la fiction prendre sa place.
Le récit est sobre, conduit du point de vue de l’adolescente contrainte de tout quitter. Perte des repères familiers, tandis que les parents tentent de maintenir la cellule familiale et son fonctionnement. En chemin, les classes sociales se mêlent, affrontent les mêmes dangers. Le récit est conduit à hauteur d’adolescente, et n’évoque pas la situation politique de façon directe – aucun des adultes n’en parle. En revanche, le pacifisme de Giono est convoqué, à travers quelques extraits de Refus d’obéissance que l’héroïne lit. Il n’est pas question de collaboration, mais de rencontre avec des Allemands, jeunes aussi, que l’héroïne ne parvient pas à voir comme des ennemis qu’elle pourrait tuer. L’un d’eux, de façon prémonitoire, récite devant elle le Roi des Aulnes, de Goethe… De façon étonnante, la chute du livre bascule dans la fiction fantastique, façon peut-être de lier les vivants et les morts. Etait-ce nécessaire ?
Récit d’exode qui, aujourd’hui, ne peut qu’évoquer les récits de migrants et rappeler que cette situation-là, intolérable, des Français l’ont vécue il y a trois quarts de siècle.