Trois Ânes (conte)
Michel Séonnet
L’Amourier (Thoth), 2009
Citoyens de la République
Par Anne-Marie Mercier
Voilà un conte bien moderne pour notre bonheur, et bien d’actualité pour notre malheur, bien ancré dans le monde réel, même si la vraisemblance est quelque peu suspendue, pour le plaisir de la fable et son exemplarité.
Il était donc… une nuit, dans une ville, on ne sait pas bien laquelle, avec ses pavillons, ses immeubles, ses boulevards déserts, il était un âne appelé Semper (qui signifie « toujours » en latin, ce qui n’est pas indifférent), échappé du garage où on l’avait enfermé. Derrière lui court Lino, fils du propriétaire de l’âne, puis l’ennemi de Lino, Samir, puis Sara qui ne les aime pas, puis monsieur Crouzon, le gardien du collège, haï des trois enfants et le leur rendant bien.
Tous courent, étrangement happés par la course de l’âne ; celui-ci suit un chemin mystérieux qui les fait passer par les étapes de leur histoire et de celle de leur famille pendant la dernière guerre où tous luttaient pour la même cause et le même camp, étapes où un âne joue le premier rôle. Chemin faisant, ils se racontent, se heurtent, se soutiennent, créent les liens qui manquaient. A « l’arrière », la police, les familles et les voisins, d’origine italienne, arabe, juive, s’alarment, s’accusent, et enfin s’entraident ; en retrouvant les enfants, ils renouent avec une histoire commune oubliée, une histoire de libération et de fraternité.
Un beau conte, magnifiquement écrit, saisissant et touchant, et un livre à la fabrication soignée, sur beau papier crème.
http://www.amourier.com/les-collections/thoth/381-trois-anes.php
Et pour poursuivre la réflexion, un article de Tramor Quemeneur, paru dans L’Ecole des lettres – jeudi 8 janvier 2015): racisme et terrorisme
Rappelons aussi la très belle BD de sociologie sur l’immigration algérienne, Les Mohamed, de J Ruiller chez Sarbacane (2011) chroniquée sur lietje.