Mon tout premier livre d’art. Tableaux célèbres

Mon tout premier livre d’art
Rosie Dickins, Sarah Courtauld

Usborne, 2011

Mon livre d’art. Tableaux célèbres
Rosie Dickins

Usborne, 2014

Manuels d’art…

 Par Dominique Perrin

mon tt prem« Tu es libre d’utiliser les couleurs que tu veux » : c’est sur ce type d’incitation idéalement explicite en ce énième siècle du rose et du bleu que repose ce « tout premier livre d’art » instructif, pratique et stimulant.Le projet est à la fois réaliste – il prend en compte le niveau de formation culturelle réel du plus grand nombre – et relativement ambitieux : il s’agit d’ouvrir en même temps les possibilités techniques et les représentations en matière d’arts plastiques. Partant, tout est inivitation ici : à empoigner résolument pinceaux et matières, mais aussi à explorer les multiples musées qui nous entourent, et plus globalement à regarder autrement le monde. Du coup, tout est « modèle » aussi, au meilleur sens du terme : le pari qui structure le livre est conforme aux acquis de la pédagogie contemporaine : des enfants cultivés et outillés sont des enfants actifs et émancipés.
tablxLe second et plus récent des ouvrages présentés ici apparaît sous ce jour nettement moins convaincant que le premier. Cette galerie de « tableaux célèbres », forcément aussi brève qu’arbitraire dans ses choix, et dont seuls les plus anciens sont situés dans le temps, ne relève assurément pas la gageure d’apprendre « tout », ou du moins quelque chose d’essentiel aux jeunes lecteurs sur les œuvres considérées. Elle tombe sous le coup, en tant que telle, des critiques percutantes formulées il y a longtemps déjà par Hannah Arendt à l’encontre du « philistinisme cultivé », attitude par laquelle la bourgeoisie s’approprie l’action artistique en la circonscrivant dans un discours technique et descriptif apte à en désamorcer la dimension de ferment social et existentiel.

Lune et l’ombre

Lune et l’Ombre
1 Fuir Malco
Charlotte Bousquet
Gulf Stream, 2014

 

  Voyager à travers les tableaux des génies oubliés

                                                                         Par Maryse Vuillermet

 lune et l'ombre image 2 Premier tome d’une série. Lune, adolescente de treize ans, artiste et solitaire,  a des problèmes familiaux. Le nouveau compagnon de sa mère Malco exerce une emprise maléfique sur les deux femmes. Elle a aussi de mystérieux problèmes physiques, elle perd la vue des couleurs puis du gout. Seuls,  certains tableaux sont encore colorés à ses yeux et en particulier ceux d’une exposition Femmes peintres des XIX° et XX°, les génies oubliés.  Elle veut aller voir l’exposition mais Malco l’en empêche.Terrorisée,  elle décide de fuir la maison mais Malco est à ses trousses. Il est accompagné ou précédé d’ombres, des créatures indéfinissables, dont elle sent la présence autour d’elle. Après une fuite et une course poursuite mouvementée,  elle parvient au musée, elle s’y réfugie mais là, stupeur ! Malco est toujours derrière elle et, au moment où il allait la rattraper, elle plonge ou est happée par l’univers du tableau intitulé Marché aux chevaux. Là, elle se met à vivre l’époque et la scène du tableau, elle y rencontre un jeune palefrenier Léo, devient son amie mais s’aperçoit que lui n’est qu’une créature de peinture. A nouveau, les ombres la poursuivent dans ce monde, elle parvient à leur échapper et à connaitre une partie de son histoire et en particulier l’origine de son prénom Lune.

L’univers de ce roman est très original, c’est à la fois un roman d’héroîc fantasy, avec ombres, maléfices, créatures du mal, métamorphoses, voyage dans le temps… c’est un roman d’initiation à la peinture car chaque toile où plonge Lune est décrite en détail avec gourmandise et passion par l’auteure, et les tableaux sont tous des œuvres de femmes peintres, les génies oubliés, donc c’est aussi un roman de revendication pour ces artistes, injustement méconnus parce que femmes, et c’est enfin un roman d’apprentissage où l’héroïne cherche à se libérer de l’emprise d’un homme brutal, à comprendre ce qu’il lui veut et donc à savoir qui elle est.

 On se demande comment l’auteur va tenir le rythme et le souffle sur trois tomes mais Charlotte Bousquet, avec Princesse des os et Vénénum, nous a prouvé qu’elle excellait à faire revivre des univers historiques en y plaçant des héroïnes pleines de vie, de curiosité et de courage.

Points

Points
Gaëtan Dorémus
Rouergue, 2013

Magicien Dorémus

Par Dominique Perrin

poinDes auteurs-illustrateurs aussi originaux et percutants, il en existe, mais peut-être en est-il peu d’aussi constants que Gaëtan Dorémus dans la production contemporaine d’albums.
La présente aventure de Géant gris – deux titres ont précédé – est une méditation en acte sur le pointillisme comme moyen pictural d’appréhension de l’espace et du mouvement. Mais c’est aussi une histoire rigoureusement, subtilement en prise sur l’expérience enfantine du temps, de l’imaginaire, et de l’amitié pour les créatures bien à tort réputées impalpables qui peuvent en sortir. Tout au long de cette très belle aventure sensible, le grand talent de l’« illustrauteur » est là, semblable et renouvelé : dédié à la figuration du dynamisme humain, celui du corps et celui de l’esprit, dans un monde redevenu immense.

Les Deux paysages de l’Empereur

Les Deux paysages 
Chun-Liang Yeh, Wang Yi
Hongfei Cultures, collection « Prodiges », 2009

De l’art de peindre en Chine

par Sophie Genin

9782355580260.gifCe qui attire d’abord dans ce grand et bel album, ce sont les illustrations. En effet, dès les pages de garde, le lecteur est transporté en Chine et, dans les moindres détails de l’histoire, il voyage jusqu’au Sichuan du VIIIème siècle. 

Le conte de fée chinois qui nous est proposé est l’occasion de découvrir deux manières de peindre : celle de maître Li, minutieux, face à celle de maître Wu, spontané. Ils ont trois mois pour peindre le Sichuan natal de la princesse Lan, au prénom signifiant « brume de montagne » qui en est nostalgique. C’est l’empereur, démesurément épris d’elle qui a fait cette commande insensée aux deux artistes. 

 Un regret, une fois l’album refermé : seules resteront imprimées dans la mémoire du lecteur les illustrations puisque la volonté didactique de le faire voyager leur abandonne la puissance d’évocation. En d’autres termes, le conte n’est pas à la hauteur de la « quête de […] perfection artistique » annoncée en quatrième de couverture. 

C’est moi qui lapin

C’est moi qui lapin 
Jean Gourounas
Rouergue

               Fais comme moi

Par Chantal Magne-Ville

peinture, création,  Jean Gourounas, Rouergue, Chantal Magne-VilleUn joli petit livre au format carré, aux illustrations tout en douceur, dont le titre joue sur les mots « lapin » et « la peins ». Il s’agit en effet de peinture. Un petit lapin blanc s’adresse directement à son lecteur, en commentant ce qu’il est en train de créer au moyen de couleurs variées. La surprise naît du fait que peu à peu les formes approximatives ainsi créées – pré, nuages, soleil, fleurs… – viennent  peu à peu orner le corps du lapin, qui se complète, et ce de jour comme de nuit. Ces transformations au caractère quelque peu magique sont soulignées par un texte minimaliste qui parfois rime, ajoutant ici et là une touche de  poésie. Une incitation à la création en toute simplicité.