Le temps des ours

Le temps des ours
Rascal
Pastel, L’école des loisirs, 2013

Puisque personne ne m’aime…je pars

Par Lauren Fargier, MESFC Saint-Etienne

LetempsdesoursCet album présente la  quête d’un petit ours en peluche, qui  à cause d’un manque d’amour a décidé de quitter la maison. Il passe alors dans un nouveau monde avec l’espoir de rencontrer quelqu’un qui l’aime enfin. Sur sa route, il croise une fleur, un nuage, des pierres et une rivière, mais aucune de ces rencontres n’est concluante, excepté celle de la rivière qui parvient finalement à lui redonner le sourire.

Par une écriture simple et poétique et une illustration aux tendres couleurs pastel, Rascal transmet beaucoup plus qu’une histoire : ses intentions se traduisent par le choix du format qui convient à l’intime, et qui permet de faire ressentir un florilège d’émotions telles que la solitude, l’amour, l’espoir, la déception.

L’illustration semble cependant prendre la pas sur le texte, par la mélancolie qu’elle parvient à faire ressentir au lecteur. On peut lire sur le visage du petit ours un désarroi que les effets de cadrage renforcent, amenant le lecteur à éprouver compassion et empathie pour lui. Néanmoins, à chaque rencontre, l’auteur accorde une double page pour montrer l’importance de l’espoir qui naît chez le personage. Enfin cette évolution positive s’observe également au travers de l’évolution de la fleur qui est fermée sur la  première de couverture et ouverte sur la quatrième. Cette transformation de la rose rend compte de l’état émotionnel du petit ours du début à la fin de l’histoire.

Cet album est un véritable coup de cœur ! En peu de mots mais avec des dessins saisissants, à travers un personnage animalier à forte valeur nostalgique, Rascal réussit ni plus ni moins à nous parler du besoin de lien social et des émotions qui s’y attachent, tout en prévenant le jeune lecteur de la complexité des relations, ce que résume la rivière : « Je veux être ton amie, mais avant toute chose, je me dois d’être honnête avec toi… Sache que je serai différente chaque jour ! Selon mes humeurs, je déborderai ». Elle montre que ces liens construisent ce qui nous fonde, l’estime de soi.

Les poètes ont toujours raison

Rascal
Les poètes ont toujours raison

L’Edune, 2011

Poèmes pour viatique

Par Dominique Perrin

Les poètes ont toujours raison » : le titre de l’anthologie adressée par Rascal aux derniers nés des « frères humains » chers à François Villon s’entend de multiples façons. Le « toujours » y est entre autres chronologique : c’est de durée qu’il est question, au premier chef dans la dédicace de l’auteur à son père, et dans le témoignage autobiographique liminaire qui relie la mémorable découverte de la poésie « sur les bancs de l’école » au geste du cueilleur-semeur adulte assemblant son bouquet de poèmes et d’images.
Du quasi haïku de Guillevic aux enjambées fantastiques des strophes de Rutebeuf, douze poèmes de langue française sont rendus magistralement présents, douze poètes – scrutant ou désignant chacun à leur manière les marges des différents systèmes de domination de leur temps – retrouvent leur aura de vivants dans des portraits qui refusent tout rajout aux poèmes, mais apportent au lecteur, rencontre imprévisible, une vision des sujets aigus, inquiets et désirants qui les écrivirent