La fille mirage

La fille mirage
Elise Broach (trad. Etaïnn Zwer)
Rouergue,  doado noir, 2013 

 

Meurtre au désert

Par Maryse Vuillermet

 

la fille mirage  Trois jeunes dans une voiture, deux garçons de dix-huit ans à l’avant, Jamie et le beau Kit,  et une fille Lucy, plus jeune,  à l’arrière. Ils traversent le désert du Nouveau Mexique pour aller à Phénix chez le père de Lucy et Jamie.

Mais de nuit, dans la tempête, ils heurtent  ce qu’ils croient être un animal.  Revenus sur leurs pas, ils découvrent au bord de la route le cadavre d’une jeune fille de leur âge. Terrifiés, ils appellent à l’aide, pas de réseau, ils  se rendent dans la maison habitée la plus proche, c’est celle d’une étrange femme sculpteur, Beth.

  La police les oblige à rester là en attendant les résultats de l’enquête, c’est alors que commencent trois jours qui vont changer leur vie.  Confrontés  à cette épreuve et perdus au milieu de nulle part, les êtres se révèlent différents du rôle qu’ils jouent habituellement. Et  comme il s’avère que la jeune fille était morte avant l’accident, Lucy s’obstine à  percer le mystère de cette mort. Les rebondissements sont nombreux, le suspens, bien  tenu.

Une ambiance à la Bagdad Café, une violence très américaine.

La Maison sans pareil (t. 2 : l’homme au masque)

La Maison sans pareil (t. 2 : l’homme au masque)
Elliot Skell
Traduit (anglais) par Alice Marchand
Flammarion, 2013

Sorties d’enfances

Par Anne-Marie Mercier

maisonsanspareil2Un peu comme l’a fait auparavant J. K. Rowlings, l’auteur fait grandir son univers avec son lecteur : chaque volume semble être taillé pour un âge différent. Si le premier (voir la chronique du 4 mars 2013) était porté part une petite dose de suspens et comportait quelques événements dramatiques, il était surtout dominé par la construction d’un univers, celui d’une maison infinie abritant une famille elle-aussi tentaculaire, entièrement occupée à des banquets, fêtes et distractions diverses.

Le deuxième volume est beaucoup plus noir : des menaces, des traques, des morts lui donnent une allure différente, sans le rendre forcément « gothique » comme le voudrait le descriptif du roman. Les répétitions un peu trop nombreuses soulignant la peur de l’héroïne semblent d’ailleurs répondre à une volonté d’augmenter la frayeur du lecteur – procédé inefficace alors que l’intérêt du roman est ailleurs.

On y découvre aussi des haines familiales, des mystères et surtout la découverte faite par l’héroïne de l’histoire de ce monde, des tensions qui y règnent et des rapports de force, dont certains sont des rapports de domination et d’asservissement. C’est un peu le chemin suivi dans un apprentissage lié à un milieu, qu’il soit familial ou étranger : on est sensible d’abord aux rites, aux côtés agréables, plus tard on comprend ce qui le fonde, son côté noir, mais aussi sa fragilité.

Comment faire partie d’un ensemble sans l’approuver totalement ? Comment prendre de la distance sans courir le risque de la rupture ? Toutes ces questions sont posées par cette maison qui interdit qu’on la quitte, mais parfois rejette au loin certains de ses membres, qui est le monde et la vie même, tout en étant un mensonge.

Le charme de ce lieu étonnant et poétique reste intact et l’on s’y promène avec ravissement, comme dans un jeu, heureux de découvrir de nouveaux bâtiments, de nouveaux recoins – fussent-ils des souterrains.

l’aventure au bout du chemin

L’aventure au bout du chemin
Ahmed Kalouaz
Rouergue, 2013
Dacodac

Délinquance sur le chemin de Saint-Jacques

Par Maryse Vuillermet

 

 

 l'aventure au bout du chemin imageChilderic en  vacances de pâques avec ses parents  près de Conques est heureux de voir arriver son grand-père de vacances,  Signol accompagné de son chien Laslo. Il sait qu’avec eux, il va s’amuser tout en enquêtant. En, effet, depuis l’été et les vacances précédentes, en Bretagne, où ils avaient  traqué des voleurs de chiens, il adore son troisième grand-père,  loué dans une agence spécialisée pour les vacances.  Ensemble, ils s’informent des faits  divers et agissent.  Or, justement sur le chemin de Saint-Jacques où ils se trouvent,  des objets d’art religieux disparaissent des églises et un prêtre a  été attaqué. Les voilà interrogeant les pèlerins  et les habitants, parcourant les petites routes sur leur moto….

Gentillet, des personnages attachants et un milieu particulier à observer, celui des pèlerins!

 

Les Fleurs parlent

Les Fleurs parlent
Jean-François Chabas, Joanna Concejo
Casterman, 2013

Le langage des fleurs ou Ovide revisité

Par Anne-Marie Mercier

lesfleursparlentPas de métamorphose dans ces trois récits de Jean-François Chabas, mais une rêverie sur la signification qu’on attribue aux fleurs, sur ce qu’elles évoquent. Les commentaires d’un ouvrage sur le langage des fleurs (de G. X. Geissmann, paru en 1899) sur la tulipe, l’œillet blanc et la pivoine sont autant de départs d’histoire. La valeur de la tulipe nous transporte aux Pays bas où un vieil inventeur d’une variété rare découvre la cupidité de ses semblables et la dureté du monde. L’œillet blanc est l’histoire d’une amitié entre deux enfants d’une tribu indienne d’Amérique que tout oppose, jusqu’à leur rencontre avec un grizzli. La pivoine orgueilleuse est l’image d’une très belle enfant, puis jeune fille puis femme, Narcisse au féminin si folle d’elle-même qu’elle se perd.

Le texte est complexe, la vision du monde désenchantée et sombre ; l’ouvrage ne s’adresse pas aux enfants mais à des lecteurs confirmés prêts à méditer sur les questions de signification, sur les apparences et leurs pièges. Les illustrations de Joanna Concejo, délicates, montrent à travers ces correspondances la fragilité des belles choses.