Les Enfants Boxcar, Les Hardy Boys.

Les Enfants Boxcar, t. 2 et 3 : L’Ile Mystère et le mystère de la maison jaune
Gertrude Chandler Warner
Novel, 2023

Les Hardy Boys. Le Mystère du vieux moulin
Fanklin W. Dixon
Novel, 2023

Ancêtres du Club des cinq ?

Par Anne-Marie Mercier

Comme Enid Blyton, Gertrude Chandler Warner a été une pionnière dans l’élaboration du roman d’aventure et policier pour enfants. Le premier volume de sa série montrait des orphelins en fuite et survivant seuls dans les bois. Le deuxième et le troisième reprennent ces mêmes enfants, ici assistés par le grand-père qu’ils fuyaient dans le premier tome et les met à nouveau dans un cadre naturel et aventureux, cette fois choisi, avec un mystère à résoudre dans chaque volume : quel est ce jeune homme qui vit seul dans l’île ? Où a disparu le mari de leur vieille gouvernante qui n’en a pas eu de nouvelle depuis des lustres ?
Chaque enfant a un rôle, les ainés comme les plus jeunes (le dernier, Benny, est le spécialiste des remarques naïves qui font sourire), le chien est là aussi (mais pas dans le troisième : il ferait chavirer le canoë encore plus vite), un peu comme dans le Club des Cinq. Mais le principal charme de ces livres réside encore une fois, plus que dans le suspense et l’aventure fort bien menés, dans la description des plaisirs de la vie au grand air, des joies de l’installation du campement, des pique-nique, de la découverte des tâches et jeux qui y sont liés : aller chercher de l’eau ou du bois, construire une étagère pour les assiettes, faire la vaisselle (très important !), faire une tarte, apprendre à pêcher, naviguer en canoë… et apprendre à survivre quand les provisions sont tombées à l’eau et qu’on est à plusieurs jours de marche de la première habitation.
L’autre particularité de ces romans est que le mystère n’est pas le but ultime des histoires : chacune d’elles permet aux enfants de combler un vide dans le tissu familial. Ces énigmes conduisent à une entreprise de réparation de pertes ; ils reconstruisent la famille et l’entourage de leur grand-père et remplissent progressivement sa maison d’êtres perdus et retrouvés, tout comme eux l’ont été.
Les éditions Novel publient également une série culte des années 1950, celle des Hardy Boys. Le deuxième volume a paru récemment,présentant encore un mystère pour de jeunes détectives. Mais ici les héros sont plus âgés, plus professionnels aussi : leur père est détective et ils l’aident dans ses enquêtes, en contact avec la police locale. Dans Le Mystère du vieux moulin, un trafic de faux billet croise une entreprise de sabotage d’usines importantes pour le pays… dangers, agressions, rebondissements multiples, poursuites, il y a tous les ingrédients d’un thriller.

 

Les Magni Freaks

Les Magni Freaks
Gaspard Flamant
Sarbacane (roman)

Comme des super héros de Marvel (en mieux)

Par Anne-Marie Mercier

Trois héros bien cabossés par la vie se retrouvent un peu par hasard et vivent des aventures entre Marseille, Aix et Lyon. Ils ont un point commun : chacun a un super-pouvoir. Squadro peut vivre sous l’eau et communique à distance à travers l’eau, Cheyenne est une passe-muraille, Liam peut voler. Chacun a un rapport différent à son pouvoir et l’a acquis dans des circonstances différentes, mais tous l’ont découvert au moment où, d’une manière ou d’une autre – mais toujours violemment –, ils sont devenus orphelins.
Ce cadre étant posé, on peut se dire que, un roman ne pouvant pas arriver à la hauteur de l’émerveillement des effets spéciaux des films de Marvel, à quoi bon en faire un roman ? Eh bien c’est une belle surprise : c’est un bon et un beau roman.
Tout d’abord parce qu’il est parfaitement écrit, composé, équilibré. Les dialogues sont justes, en langage très banlieue populaire pour Cheyenne, marseillaise à la famille bigarrée, en français approximatif pour Liam l’irlandais, en langage bizarre, italien ensemencé de Rap marseillais pour Squadro, l’homme poisson (comment il a découvert le rap, c’est aussi une belle invention !). Quant à la narration, elle est écrite dans une langue et un style riches, soignés, précis, souvent beaux, très justes.
Liam maitrise mal son pouvoir, découvert depuis peu, et cela donne lieu à de micro-épisodes comiques réussis. Cheyenne porte la dimension tragique du récit : elle cherche à venger son frère, assassiné au moment où il fouinait vers une usine de retraitement de déchets dont le propriétaire est le caïd du quartier. Tous sont redevables à ce criminel, et tout le monde le craint, à raison car il est lui aussi une autre espèce de monstre. Squadro, lui, met la préoccupation écologique au cœur du polar : il s’agit aussi bien de trouver et neutraliser l’assassin de Toufik que de punir l’homme qui salit les océans.
Rebondissements multiples, vision chaleureuse de la vie des quartiers urbains pauvres, sur le plan humain, mais désastreuse aussi, c’est une belle plongée dans un monde tantôt glauque tantôt lumineux, dans lequel les super héros font rêver à davantage de justice, comme des super héros de Marvel (en mieux).

L’Héritage de Judith Blackwood

L’Héritage de Judith Blackwood
Nathalie Somers
Didier jeunesse, 2023

Échec et polar

Par Anne-Marie Mercier

Roman victorien inspiré de Jane Austen montrant la difficile situation des jeunes filles sans fortune ? Remake du Petit Lord, dans lequel un orphelin – ici une orpheline,, les temps changent –  arrive à se faire reconnaitre par un ancêtre bourru et riche qui avait déshérité ses parents ? Le roman est un peu tout cela dans un premier temps, peinant parfois à se démarquer de ses grands modèles, mais excellant dans la description d’architectures du temps.
Il s’en émancipe rapidement pour devenir un intéressant roman policier, parfois un thriller dans lequel le morts s’accumulent : qui a tué l’irascible grand-père de Judith ? qui cherche à la faire accuser ? qui tue successivement ceux qui vivent sous le même toit qu’elle ? Enfin, pourquoi hérite-t-elle d’un échiquier avec une partie en cours avec l’interdiction de déplacer les pièces ?

Les joueurs d’échec et les amateurs de stratégies se régaleront; ceux qui n’ont pas joué aux échecs depuis longtemps prendront une furieuse envie de s’y remettre…

Mon Grand-Père est un gangster

Mon Grand-Père est un gangster
Guillaume Guéraud
Rouergue, 2023

Sortie de taule en famille

Par Anne-Marie Mercier

Le titre annonce d’emblée le programme, même si le lecteur aura quelques surprises en chemin. Ce grand-père, Pépé Napoli, qui sort tout juste de prison au début du roman, s’est rangé et n’aspire qu’à profiter de la vie dont il a été privé, lorsqu’il a été accusé à tort d’un meurtre pour protéger un caïd de la ville.
Mais sa famille ne l’entend pas ainsi : tous ont vécu dans la légende de cet ancêtre valeureux et ont espéré qu’avec lui ils sortiront de la misère dans laquelle malgré leurs petits arrangements, ils sont plongés. L’ainé vole des voitures qui tombent immédiatement en panne, quant au narrateur, le cadet, il est un petit voleur à la tire assez maladroit et sa mère trouve que travailler c’est trop dur…
Malgré sa désapprobation, Pépé Napoli devra pour réaliser ses rêves de petits bonheurs se remettre au « travail ». Sa route croisera celle du caïd qui l’a fait envoyer en prison à sa place…
La fin est-elle édifiante ? Justice est faite en un sens, mais pas comme on pourrait le penser. C’est réjouissant, totalement malhonnête, surprenant et drôle en mode noir, et rose avec une petite pique contre Jeff Koons.

 

Enquêtes à Frousseville

Enquêtes à Frousseville
Estelle Vidard, Crescence Bouvarel
Flammarion jeunesse, 2022

Le jeu de la même pas peur

Par Anne-Marie Mercier

« Douze énigmes, 20 suspects. A toi de jouer »

Livre-jeu, cet ouvrage explore le folklore des figures qui font peur de manière humoristique : chaque créature, d’emblée caricaturale (sorcière, extraterrestre, zombie, ogre…) est elle-même croquée dans le style de la caricature. Les vingt personnages sont divisés en quatre catégories (humains, monstres et revenants). Sur chaque double page on trouve la mise en scène d’une énigme regroupant quelques-unes d’entre elles dans un décor différent et demandant au lecteur de trouver le ou la coupable à l’aide d’indices présents dans l’image.
Pour s’aider, le lecteur peut regarder en détail les personnages grâce à leur représentation en figures cartonnées détachables et positionnables sur un support – ce petit détail est un peu superflu mais le plaisir de découper et de manipuler attirera certains enfants et l’on peut imaginer que d’autres histoires pourront en surgir par la suite. Leurs costumes, leurs accessoires, leurs cheveux, des traces sur leurs vêtements ou sur leur visage, tout peut aider à trouver la réponse.
Couleurs sombres, couleurs vives qui jouent sur le choc des complémentaires, décors sinistres, multiples détails qui servent autant à perdre le détective qu’à le fasciner, tout est horrifique, à part la résolution, pas très difficile (et en plus il y a une solution à la fin de l’ouvrage).

 

 

Les enquêtes de Mirette

Les enquêtes de Mirette
Fanny Joly, Laurent Audouin (ill.)
Sarbacane, 2023

Big Frousse à Londres
Panique à Paris
Embrouilles en Bretagne
Qué calor à Barcelone !

 

Une série de polars touristico-folkloriques

Par Anne-Marie Mercier

Mirette est une jeune détective. Elle est accompagnée de son chat, Jean-Pat, dit JP, amateur de séries télévisées et de Choumoullows et doté d’un sale caractère. Tous deux résolvent de nombreux mystères : vols, enlèvements, escroqueries… avec toutes les astuces des « vrais » détectives : filatures, recherches d’indices, interrogations d’experts, etc. Ils sont équipés tous deux de « zécrans » (autrement dit smartphones) qu’ils utilisent à bon escient…
Autant dire que malgré l’ancrage de ces petits romans dans un « mauvais genre » (le roman policier), ils se situent du côté de l’éducation. Chaque enquête permet de découvrir une grande ville ou une région. On ne dira pas une culture tant les clichés sont massifs : en Bretagne ils sont accueillis par une femme portant une coiffe de bigouden à longueur de journée, ils dorment dans un lit clos et ils ne mangent que les spécialités locales (far, crêpes, cidre…) et finissent évidemment dans un champ de menhirs. En Espagne on n’évite pas les castagnettes (Barcelone n’est pourtant pas l’Andalousie), et à Londres le Double Dekker et le majordome. Si cette série parait à présent en poche, après avoir été éditée à partir de 2014, elle reste comme à son origine très actuelle ou pas du tout.
Tout ça est bien sûr pour rire : même pas peur ! et la fantaisie galope avec l’intrigue. Les illustrations comiques nombreuses, le texte très aéré, les présentations de personnages en début de roman, les quizz à la fin, tout est fait pour simplifier la tâche au jeune lecteur sans pour autant appauvrir l’histoire.

C’était juste un jeu

C’était juste un jeu
David Moitet
Didier Jeunesse 2023

Quand l’urbex vire au cauchemar…

Par Michel Driol

L’urbex, c’est l’exploration des ruines urbaines, des boites de nuit, des usines… Voilà à quoi se livrent quatre collégiens de 3ème, qui se sont donné des règles très strictes pour effectuer ces visites en toute sécurité. Mais lorsque Simon veut tester Zach, un nouveau, et lui donne rendez-vous seul dans une usine désaffectée, au mépris de toutes les règles, et que Zach ne vient pas en cours le lendemain, tout se complique et s’accélère…

David Moitet signe ici un polar urbain, avec disparition, enquête, suspense, un thriller qui réunit des personnages bien identifiés. Si les quatre personnages principaux sont amis et collégiens, leur arrière-plan familial est bien dessiné, familles de la classe moyenne, mais présentant toutes des fêlures : mère atteinte d’un cancer, mère décédée, parents trop occupés pour s’occuper de leur enfant. L’urbex leur apparait comme leur monde, une façon de se singulariser et de souder leur groupe, en cachette de leurs parents. C’est un roman mettant en scène des adolescents, leurs amours, leurs faiblesses aussi, comme ce mépris envers certains qu’affiche Simon, ce qui fait fortement réagir Zia. L’intrigue est bien construite, avec un premier chapitre en je, qui ouvre le suspense : qui est ce je en danger ? Puis on passe à un récit classique à la troisième personne, jusqu’à un chapitre reprenant mot pour mot le premier chapitre, en remplaçant le je par un il, révélant ainsi l’identité de la victime. Ensuite, on a une alternance entre chapitres en je, le point de vue de la victime, et des chapitres à la 3ème personne, l’enquête. C’est efficace et permet de ne pas rompre l’ordre chronologique, tout en diffractant les points de vue. Pour autant, l’enjeu du roman est peut-être ailleurs, dans la découverte d’une autre ville que font les héros : celle d’un quartier plus populaire, des barres d’immeubles gangrénées par les trafics de drogue, celle d’autres familles où l’on s’entraide sans parvenir à trouver le travail correspondant aux études faites. Le roman permet ainsi à deux mondes qui se côtoient pourtant dans la même classe de troisième de mieux se connaitre, et au petit groupe de 4 de s’ouvrir à d’autres. C’est l’exploration de la ville contemporaine, dans sa complexité, et non plus seulement celle des vestiges du passé.

Un récit haletant qui met en scène un groupe de jeunes aux prises avec de vrais délinquants, sans dénigrer le monde des adultes (parents et policiers).

Les Hardy Boys, La tour au trésor

Les Hardy Boys, La tour au trésor
Franklin W. Dixon
Traduit (USA) par Amélie Sarn
Chatycatt / Novel, 2023

Made in USA

Par Anne-Marie Mercier

Nous voici dans une étape la littérature de jeunesse (ou de la paralittérature ? ces distinguos ne sont plus très pertinents). Paru en 1927 (ou 1926?), chez Stratemeyer Syndicate, ce premier tome fut parait-il une révolution, introduisant le roman policier dans les lectures adolescentes. Je ne comprenais pas bien pourquoi l‘histoire est située en 1959 dans le volume que j’ai lu : une reprise ? projection dans le futur ? La réponse se trouvait sur Wikipedia, bien sûr :
« Au fil des rééditions, le texte d’origine a été abrégé et modernisé. C’est en 1959 que le Stratemeyer Syndicate décide de mettre au goût du jour les titres déjà parus. Des coupes sont faites dans les descriptions pour accélérer le rythme du récit, les termes et expressions démodés sont actualisés et les histoires sont purgées de tout ce qui serait aujourd’hui qualifié de politiquement incorrect (références aux Noirs, etc.). Certaines histoires sont scindées en deux. »
Publiés en France dans les années soixante par Charpentier, ils sont peu connus aujourd’hui, mais les éditions Novel » vont sans doute y remédier…
Alliée à la maison d’édition bilingue Chattycat au joli nom,  Novel est « née de l’imagination de deux éditeurs, l’un français et l’autre, américaine, la maison d’édition jeunesse Novel publie des traductions de best-sellers anglo-saxons ainsi que des créations françaises. Les deux séries phares de Novel sont de grands classiques américains qui étaient, jusqu’ici, inconnus en France : Les Hardy Boys et les Enfants Boxcar. » (on parlera des deuxièmes dans la chronique suivante).

Ce volume s’avère d’une lecture facile, pleine de péripéties et aussi de bons sentiments : on cherche à innocenter un père de famille accusé à tort et licencié ; son fils, le camarade des détectives en herbe doit quitter le collège pour travailler dans un supermarché… On est plus proche de la vraie vie que chez Blyton. On se rapproche aussi de la série Alice dans la mesure où Dixon est un pseudo : plusieurs auteurs ont participé à l’écriture.
Les deux  détectives en herbe sont fils d’un détective. Ce personnage de père est parfait : il les guide de loin, les conseille, les met en confiance ou les invite à la prudence. Cela aide à la vraisemblance, qui est régulièrement mise à mal, mais il faut bien que l’enquête soit résolue et que tout finisse bien, n’est-ce pas? Les deux jeunes gens, lycéens, se déplacent en moto, ce qui doit faire rêver bien des lecteurs ; ils ont beaucoup d’amis (dont un qui a une voiture, qu’il bricole), et parmi eux des filles. C’est une lecture vitaminée, qui n’a presque pas pris de rides, si l’on excepte la facilité des découvertes et la douceur ambiante au royaume du polar.

Londinium, t. 2 : Sous les ailes de l’aigle

Londinium, t. 2 : Sous les ailes de l’aigle
Agnès Mathieu Daudé
L’école des loisirs, medium +, 2022

Arsène Lapin, espion de la reine

Par Anne-Marie Mercier

Londinium est un régal. Son héros, un lapin nommé Arsène (Arsène lapin, donc, ha, ha !), porte monocle et montre de gousset : on aura reconnu un hommage appuyé à Alice de Lewis Carroll, avec le héros de Maurice Leblanc, voila un drôle de mélange. Il n’aime rien tant que fumer un bonne pipe de lucernum dans la tranquillité du foyer confortable, c’est donc un genre de Hobbit aussi.
Le monde de Londinium est un univers où cohabitent plus ou moins bien humains et animaux, avec de nombreux détails sur la géographie de la ville, les habitudes humaines reprises ou on par certains animaux, les lois et la façon de les faire appliquer par tous, etc. C’est une belle utopie imparfaite sur un avenir ans lequel l’espace serait partagé entre les espèces.
Comme Frodon, voilà Arsène embarqué malgré lui dans une aventure effrayante et inconfortable : il doit se rendre en Allemagne pour comprendre ce que manigancent Hitler et le prince héritier anglais. Enquêtant sur le sort des animaux en Allemagne, il découvre le sort des juifs et l’ampleur de la catastrophe future sans vraiment la comprendre. Il offre sur la période un regard naïf tout à fait intéressant. Il rencontre même des figures qu’on n’aurait pas imaginées voir dans un livre pour la jeunesse, celles d’Abby Warburg, avec sa fameuse bibliothèque et de son frère.
C’est drôle, sauf lorsque ça ne peut pas l’être. Le voyage d’Arsène est ancré dans la géographies des villes européennes (Londres, Berlin, Hambourg), plein de rebondissements et d’énigmes. Bonne nouvelle : le tome trois arrive bientôt !

Griffes

Griffes
Malika Ferdjoukh
Ecole des Loisirs Medium + 2022

Au Service des Dossiers Insolites et des Intrigues Non Conventionnelles

Par Michel Driol

C’en est fini de la tranquillité de Morgan’s Moor, petit village du Northumberland, lorsqu’arrive la diligence avec, à son bord, une voyante extra lucide qui décrit le meurtre horrible du juge Apley et désigne du doigt son meurtrier, Horton Palace, le mercier… Et lorsqu’on découvre que le juge est bien mort comme le medium l’annonçait, il n’y a plus qu’à arrêter, juger et condamner le pauvre Horton. Et lorsque, quelques années plus tard, la sœur du juge meurt dans sa chambre fermée au loquet, Scotland Yard envoie le superintendant Tanybwlch et son jeune adjoint, Pitchum Daybright, qui assistent, impuissants, à d’autres meurtres, dont ils trouveront les coupables à l’aide de la fille de l’aubergiste, Flannery Cheviot, dont la langue bien pendue n’a d’égale que la curiosité et la perspicacité !

Ce nouveau roman de Malika Ferdjoukh sonne comme un hommage à Dickens et à Conan Doyle. Ne se situe-t-il pas, grosso modo, à l’époque de ces deux grands auteurs britanniques ? Difficile de résister au charme et suspens de ce roman, qui sait mêler différents genres. Roman policier, avec le classique meurtre en chambre close, thriller avec les menaces qui pèsent sur les personnages. Roman d’amours, avec deux intrigues parallèles et différentes : un amour avoué, assumé, contrarié, et un amour naissant entre le timide Pitchum, souvent aussi rouge que ses cheveux, et l’impayable Flannery, qui ne cessent de jouer au chat et à la souris ! Roman historique, avec l’inscription dans l’Angleterre victorienne de la fin du XIXème siècle, avec ses zones d’ombre comme ces hospices où venaient accoucher des jeunes femmes célibataires. Comme souvent chez l’autrice, on trouve des personnages vivants, de jeunes hommes amoureux figés, des jeunes filles impertinentes, pleines de débrouillardise, qui ne rêvent que de sortir de leur condition. Comme dans tout roman populaire, on croise des enfants abandonnés, retrouvés, des innocents persécutés, et une part de gothique fantastique qui rôde entre landes et brumes, signe des romans de cette époque, signe du mal toujours présent sous différentes formes dans nombre de romans de Malika Ferdjoukh, mais qu’on parviendra à vaincre. L’écriture est enlevée, révélant parfois de bonnes trouvailles dans l’expression ou les comparaisons, l’intrigue, complexe à souhait, est rondement menée, avec de nombreux rebondissements, et les personnages, qu’ils soient secondaires ou de premier plan, bien campés.

Un roman qui séduira les amoureux du roman policier historique, surtout s’ils sont fans d’humour anglais, et des noms de personnages improbables !