Le Diable 2.0
Aurélie C. Moulin
Casterman 2025
Maison superconnectée
Par Michel Driol
Evan, dont les parents sont réfractaires aux nouvelles technologies, parvient à se procurer – un peu illégalement, mais ce n’est pas le problème – une carte permettant à toute sa famille de passer une semaine de rêve dans le prototype d’une maison ultra-connectée. On commence par leur injecter une puce électronique. Puis, au moment de les laisser, le professeur glisse un mot dans la main d’Evan, Désolé… Et que faire lorsque l’Intelligence Artificielle de la maison, MIA, prend le pouvoir sur leurs corps, leur imposant un régime alimentaire drastique, des exercices physiques exténuants, et montrant alors une face bien peu amène ? Que faire quand les machines veulent prendre le pouvoir ?
Publié dans la collection Hanté, voilà un roman qui oscille entre la science-fiction et l’épouvante. Le héros doit se battre contre une entité maléfique, hostile à l’humanité, entité qui n’est pas surnaturelle, mais une forme d’intelligence artificielle dont le lecteur sait, dès le début, qu’elle n’est pas au point, mais que la société qui la produit décide malgré tout, pour des questions financières, de commercialiser. Très vite, les rôles s’inversent, et la maison, au lieu de recevoir des ordres, va en donner, afin de réaliser son projet, prendre le pouvoir sur l’humanité. Actualisant ainsi les mythes de la créature qui s’émancipe, du robot qui échappe aux lois de la robotique imaginées par Asimov, judicieusement rappelées dans le roman, le roman questionne sur le pouvoir que nous accordons à la technologie, et sur la confiance qu’on peut lui accorder. Le héros et le lecteur naviguent entre réel et virtuel, l’autrice sachant brouiller les pistes, entrecroiser les faits et la façon de les interpréter, jusqu’à une chute qu’on ne révélera pas, mais bien à l’image des inquiétudes que cette soumission à l’IA peut générer. Le roman, haletant, rythmé, plein de rebondissements et de scènes très fortes, marquantes, se lit d’une traite, et laisse le lecteur se questionner sur le pouvoir des objets connectés.
Un roman d’épouvante, dans lequel la puissance maléfique est un objet technologique terrifiant, pour à la fois se divertir en jouant à se faire peur et se questionner en se demandant quel futur nous souhaitons.