Jim pop, l’incroyable histoire de l’homme canon

Jim pop, l’incroyable histoire de l’homme canon
Tom Henni
Rouergue, 2011

Cirque de papier

par Anne-Marie Mercier

Tom Henni ,Rouergue,Anne-Marie Mercier,cirque,illustration (histoire de l')Grand album au format plus haut que d’ordinaire, au papier mat et épais, Jim Pop imite l’esthétique des illustrés des années 50 (quadrichromie qui bave un peu, couleurs franches). Ces couleurs imitent aussi celles du cirque : rouge, bleu, jaune, un peu de vert de temps en temps. Les formes schématiques se rapprochent du dessin d’enfant.
Tom Henni réussit le tour de force de faire exister un numéro de cirque rien qu’avec du papier, des mots et des couleurs. On y entre par une double page de garde, on en sort de même à la fin. Et pendant ce temps, le numéro de Jim Pop, l’homme canon, se déploie tout autour de la terre, emporté par son élan. On le voit en faire le tour dans la partie inférieure de l’image tandis que la partie supérieure montre les paysages qu’il parcourt, illustrant le rêve des enfants qui veulent croire à la merveille commentée par un M. Loyal enthousiaste.http://tomhenni.frLorsque les enfants grandiront, ils devineront peut-être le « truc » que quelques indices permettent de deviner. Oui, cette histoire est « incroyable »…
Pour les lyonnais : formé à Lyon et à Strasbourg, Tom Henni a créé l’identité visuelle de la librairie « Ouvrir l’œil », rue des Capucins et co-fondé le collectif « Mademoiselle, Messieurs » avec Émilie Chéron et Emmanuel Romeuf.
Pour les autres : on lit sur son site (http://tomhenni.fr) qu’il s’intéresse particulièrement à l’histoire du livre et aux techniques d’impression : ça se voit, et c’est tant mieux.

Saltimbanques

Saltimbanques
Marie Desplechin, Emmanuelle Houdart

Thierry Magnier, 2011

Sublimes jongleries

par Anne-Marie Mercier

Saltimbanques.jpgOn a ici un « album »  au premier sens du terme : une collection d’images, un portfolio d’artiste. Personnages au corps ou aux vêtements étranges, inscrits sur fond blanc dans un cadre minimal mais emblématique, ils forment une sorte d’encyclopédie. Ils représentent différents emplois du cirque : colosse, dompteur, ventriloque, femme à barbe… le familier le dispute à l’étrange, voire au monstrueux et certains sont franchement inquiétants. Le très grand format  convient parfaitement aux superbes portraits composés par Emmanuel Houdart.

 Marie Desplechin  leur donne un nom, une origine et propose pour chacun une histoire. Certaines sont limpides, d’autres très complexes. L’ensemble forme une troupe unie par de multiple fils et le tout est bien plus qu’une juxtaposition de textes et d’images : une oeuvre naît. On aura sans doute deviné qu’elle sollicite un lecteur avancé ou très accompagné et qu’elle ravira, quel que soit leur âge, tous ceux qui apprécient l’une ou l’autre créatrice.

L’ écuyère, La très sombre histoire d’une future enfant de la balle

L’ écuyère
Elzbieta

Rouergue, 2011

La très sombre histoire d’une future enfant de la balle

par Anne-Marie Mercier

L' écuyère.gifElzebia mêle dans cet album plusieurs des thèmes qu’elle a explorés précédemment. Celui de l’enfance malheureuse est illustré à travers l’histoire de Tittine qui a eu la malchance de naître chez une « maman à une place » où la place était déjà prise par sa soeur aînée. Celui de la pauvreté : celle de cette « maman à une place » n’arrange pas les choses. Orphelinat, prison, sombre château où l’on martyrise les enfants,… le monde est un lieu cruel pour les petits. Heureusement, il reste le rêve, incarné par le monde du cirque et par un sympathique fantôme.
L’humour est ici très noir, le ton très enfantin, d’allure naïve (l’orphelinat est appelé « la maison des enfants sans parents »). Cette allure est aussi celle des images, proches parfois de dessins d’enfants. Le texte est fait de phrases brèves, simples en apparence. Il court sous des vignettes allongées, alternant constats loufoques et bribes de dialogue. La forme évoque les récits illustrés d’autrefois, ceux d’avant la B.D.

L’ensemble est beau et touchant et l’on suit les aventures de Tittine et de sa soeur, l’horrible Poupi (on adore !), comme un feuilleton de roman populaire où tout est possible, l’extrême solitude comme les espoirs les plus merveilleux : être adopté(e) par un éléphant, sauvé(e) par un fantôme, trouver une famille qui vous aime, ne vous abandonne pas et vous laisse décider de votre vie, écuyère ou enfant d’éléphant, qu’importe!  Ici, devenir écuyère est un horizon pour survivre, comme devenir pompier, princesse ou roi des singes.