Je suis venu tout seul
Nicole Dedonder
mØtus (mouchoir de poche), 2011
Deuil : mode d’emploi en petit carnet
par Anne-Marie Mercier
Rémy se rend régulièrement sur la tombe de son frère, souvent seul, parfois avec sa mère. Là, il lui parle, le questionne. Il lui raconte l’avancée de ses amours avec Louise, ce que deviennent les copains qui l’oublient, entrent en sixième, trouvent qu’un cimetière est un lieu infréquentable. Il rêve aussi, il joue, met des notes aux inscriptions qu’il lit sur les autres tombes, imagine la vie des autres, écrit ses pensées dans un petit carnet. Les années passent, mais pas le souvenir.
Imprimé en blanc sur noir comme tous les livres de cette collection « mouchoir de poche », ce n’est pas un livre funèbre et pourtant il dit beaucoup sur la mort d’un frère, avec les questions que les enfants se posent, les vêtements qu’on essaie de leur faire porter, leur solitude face aux autres qui ne comprennent pas.
			
« Le carillon des anges » : l’évocation de ce jouet que la famille du narrateur, Pierre, ressort à chaque Noël, encadre le récit et fait mesurer ce qui s’y est joué.
Tine Mortier évoque avec une grande sensibilité les rapports entre Marie et sa grand-mère. Une complicité sans faille les lie. Elles se racontent des histoires, partagent leur amour des gâteaux et de la vie, les mille et une choses du quotidien. Le temps qui apporte décrépitude n’aura pasde prise sur ce lien qui les unit…. Marie sera toujours aux côtés de sa grand-mère, même quand elle aura perdu la parole, le goût de la nourriture, de la vie…
Le procédé narratif, sans être original (on songe au superbe Je t’écris, j’écris d’Eva Caban), est intéressant : une petite fille écrit dans son journal intime des lettres à son grand-père décédé. Il y a des moments émouvants : celui où elle manque de garder pour lui le gros bout crémeux de la bûche, celui où elle retrouve le papier où il avait écrit les scores d’un jeu auquel ils avaient joué.
Cet album est, en apparence, modeste et par là même, touchant. Il ne cherche pas à donner de la mort et du deuil une vision originale ou poétique ou profonde. Non, il dit tout simplement, avec des phrases très courtes, de celles que saurait écrire un enfant, les sentiments qui peuvent unir un chat, un petit garçon et sa maman. Il dit la rupture que provoque la maladie. Il dit la tristesse.